L.J.Peter
L'auteur
Le principe de Peter livre
Le livre

Le principe de Peter a fait grincer quelques dents, lors de sa parution en 1969. Pensez: il jetait à bas bien des certitudes en prétendant démonter que tout poste finit toujours par être occupé par un incompétent.
Il a causé pas mal de migraines à ceux qui, comme feu mon ami Michel Rouzé, voulaient sauver leurs compatriotes du désespoir, et lui trouver une réfutation.
Mais l'introduction du livre est sans appel:
La démonstration qui suit l'énoncé du Principe de Peter est irréfutable, parce que puisée dans les mille et un exemples de la vie courante...
Nous verrons qu'il n'en est rien, et que la réfutation du principe se trouve dans le livre même

Découverte et énoncé du principe

allégorie
Allégorie: l'employé monté trop haut
Le principe de Peter se fonde sur l'analyse des mécanismes de promotion au sein d'une pyramide hiérarchique. Ce faisant, il décrit l'évolution future d'une hiérarchie, et c'est ainsi qu'il peut se targuer de fonder la hiérarchologie.
Comment Laurence J. Peter a-t-il découvert son fameux principe? Il s'en explique:

En constatant cette incompétence à tous les degrés de toute hiérarchie, politique, juridique, universitaire et industrielle, j'ai fini par penser que la cause résidait dans quelque trait inhérent aux réglement concernant le placement des employés. Ce fut ainsi que commença mon étude très sérieuse de l'ascension des salariés dans la hiérarchie et de ce qui leur arrive après avoir été promus
Et il continue:
Je finis par constater que dans tous ces cas, il y avait un dénominateur commun. L'employé avait été haussé de l'état de compétence, à celui d'incompétence. Je compris que, tôt ou tard, cela pouvait arriver à tout employé, tout subordonné dans toutes les hiérarchies.
...
Mon étude de centaines de cas d'incompétence dans le travail m'a donc conduit à formuler le Principe de Peter:
Dans une hiérarchie, tout employé à tendance à s'élever à son niveau d'incompétence

Avec cette conclusion peut encourageante:
Ainsi, avec le temps - et en supposant l'existence d'un nombre suffisant de rangs dans la hiérarchie - chaque employé s'élève et demeure à son niveau d'incompétence. Le corollaire de Peter précise:
Avec le temps, tout poste sera occupé par un employé incapable d'en assumer la responsabilité


Les nombreux exemples donnés, ne sont d'ailleurs pas utiles, car il suffit de cette constatation de base:

Tout membre d'une hiérarchie est promu à un échelon supérieur s'il est compétent à son poste

Et le principe de Peter s'en déduit immédiatement

La hiérarchologie

incompétencemètre
L'incompétencemètre
Laurence J. Peter ne réduit heureusement pas les employés à ces deux classes des compétents et des incompétents. Il tient aussi compte des "queues de distribution". Des deux cotés de la courbe en cloche de la compétence, il y a les cas extrèmes des supercompétents et des superincompétents. Dans les deux cas, les sujets ne restent pas longtemps dans la hiérarchie: ils subissent ce que l'auteur appelle la défoliation hiérarchique. En termes non politiquement corrects, ils sont virés.
La justification est qu'ils bouleversent la hiérarchie. Mais toujours en d'autre termes, ils sèment la merde.
Ces deux catégories sont les seules à ètre éliminés par les règles de la hiérarchologie. Il existe cependant un cas, ou un employé jusqu'alors simple incompétent peut être défolié-viré (rayez la mention inutile). C'est le cas de l'employé qui devient superincompétent (pour des raisons qui frise la pathologie). Il se place alors lui même sur le siège éjectable.

Cependant, il existe des exceptions apparentes. On observe parfois des incompétents promus. Mais promu à quel poste? A un poste, en apparence supérieur dans la hierarchie, mais où l'incompétence du promu fera moins de dégats. Cette forme de promotion n'est pas autre chose que le principe de Dilbert, qui est aujourd'hui plus à la mode que celui de Peter: « Les gens les moins compétents sont systématiquement affectés aux postes où ils risquent de causer le moins de dégâts : l'encadrement. ».
Ce prétendu nouveau principe, était donc déja décrit par Peter, sous le nom de sublimation percutante. Toujours en d'autres termes, il s'agit d'une promotion bidon

Un autre cas est celui de l'arabesque latérale. Le sujet est promu à un autre poste, avec un titre plus ronflant, mais au même salaire (ça coute moins cher)

Enfin, un cas encore plus vicieux est celui de la lévitation hiérarchique: Le sujet reste à son poste, avec le même titre, et le même salaire, mais tout son personnel est réaffecté dans un autre service

Juqu'ici, le problème parait simple, à l'exception du malheureux supercompétent, un employé monte en grade tant que son incompétencemètre est dans le vert, puis cesse de monter quand il arrive dans le jaune. Il peut arriver qu'il passe de lui même dans le rouge, auquel cas il est éjécté. Mais nous verrons qu'il y a des cas ou il pourrait néanmoins être promu malgré son incompétence

La réfutation du principe

Diverses tentatives de réfutation ont été alléguées:
Un employé pourrait se trouver plus compétent à un échelon supérieur: Winston Churchill, ministre de la marine incompétent lors de la première guerre , se serait révélé compétent, à l'échelon supérieur, lors de la guerre suivante. En fait c'est faux. Churchill avait bien préparé sa flotte au premier conflit mondial, mais fit preuve d'incompétence en tant que stratège naval, en envoyant ses cuirassés se faire couler aux Dardanelles. Il récidiva d'ailleurs lors du second conflit. L'exemple ne vaut donc rien.
Et d'ailleurs, Peter cite des cas ou des défoliés hiérarchiques, viré l'un pour supercompétence, l'autre pour superincompétence, prirent un nouveau départ ailleurs:
W. Wheeler était livreur à bicyclette au service des messageries Mercure.
...
Quand il se mit en tête de réorganiser les livraisons de ses collègues, il fut renvoyé.
...
Mais il se mit bientôt à son compte, créa les messageries volantes Pégase et en trois ans mit Mercure en faillite
...
Thomas A. Edison, renvoyé pour incompétence quand il vendait des journaux, fonda sa propre société qui fut une réussite totale


Un autre argument est que dans l’idéologie de Peter, les promotions correspondent systématiquement à des niveaux de complexité croissants, ce qui est faux. Mais le principe de Peter constate simplement qu'un incompétent à son poste ne monte plus en grade, quelque soit la complexité des grades inférieurs et supérieurs. Cet argument est donc faux lui aussi

La vrai réfutation se trouve dans le livre.
Le principe de Peter suppose que l'autorité qui assure la promotion est capable de distinguer qui est compétent, et qui ne l'est pas. Or l'auteur sait parfaitement que ceci est faux. Il explique au chapitre III:
La compétence d'un employé est déterminée non par le public mais par son supérieur dans la hiérarchie.
...
Mais si le dit supérieur a atteint un niveau d'incompétence, il se fiera sans doute à des valeurs abstraites pour juger ses employés, estimera compétent celui qui observe les réglements, les rites, les formes du statu quo.
...
C'est ce que j'appelle l'inversion de Peter
...
L'inverti de Peter... continuera de gravir les échelons jusqu'à ce qu'un faute le place à un poste où il doive prendre des décisions

l'inversion de Peter, décrit en fait ce qui se passe dans toute administration de l'état. Un employé compétent ne peut l'ètre qu'en prenant des libertés avec le règlement. Il est donc incompétent selon les critères de l'administration, pour laquelle est compétent et monte en grade, celui qui connait et respecte parfaitement les règlements. A l'inverse d'une hiérarchie normale, les incompétents montent en grade, et les compétents sont bloqués. Doit on énoncer que dans l'administration, tout employé a tendance à s'élever à son niveau de compétence? Ce serait trop beau, car en fait, il peut aussi se montrer superincompétent et disparaitre
Mais plus loin, au chapitre V, Peter enfonce le clou:

La différence entre le syndrome de la pseudo-réussite et le syndrome du dernier poste est connue sous le nom de nuance de Peter. Afin de classer ces divers cas, vous devez toujours vous demander: « Cette personne accomplit-elle un travail utile? » Si la réponse est:
Oui: elle n'a pas atteint son niveau d'incompétence et ne présente par conséquent que le syndrome de la pseudo-réussite.
Non: elle a atteint son niveau d'incompétence et présente donc le syndrome du dernier poste.
Je ne sais pas: vous avez atteint votre propre niveau d'incompétence. Examinez-vous et cherchez immédiatement vos symptômes!

Et voila, de l'aveu même de Peter, un employé peut être promu malgré son incompétence, si son supérieur est lui même incompétent. Il peut donc devenir superincompétent, ou au contraire compétent, puisque la complexité n'est pas forcément croissante dans la hiérarchie
Autrement dit, le principe de Peter tel qu'il est énoncé par son auteur ne vaut rien. Le vrai principe devrait s'énoncer:

Dans une hiérarchie dont l'autorité suprème est compétente, tout employé à tendance à s'élever à son niveau d'incompétence

Ainsi le principe de Peter est réfuté, mais cette réfutation décevra ceux qui l'attendaient, puisque la situation réelle est pire

Les mécanismes rééls de la promotion

Toutes les hiérarchies ne sont pas dirigées par une autorité compétente ( par exemple dans le cas de la transmission d'autorité par héritage ) et nous venons de voir qu'un directeur incompétent transgresse le principe de Peter, en n'étant plus capable de juger, si ses subordonnés doivent être promus, ou pas. L'incompétence augmentant globalement, la hiérarchie est menacée de disparition s'il y a concurrence. Elle pourra alors être absorbée par une autre hiérarchie, ce qui fait apparaitre une nouvelle transgression du principe de Peter: Quand une hiérarchie est absorbée, les inconpétents ne sont pas réembauchés, et sont alors éliminés comme des superincompétents
Examinons les autres cas:
Une hiérarchie dirigée par un superincompétent n'est pas viable, et disparait donc rapidement. Soit toute la pyramide hiérarchique disparait, soit seulement son sommet
Mais il reste le cas du directeur supercompétent, qui n'aura pas le même comportement qu'un directeur compétent, vis à vis d'un subordonné supercompétent. Il le placera probablement au poste optimal. De même, il trouvera probablement les moyens de virer les incompétents
Donc, dans une hiérarchie dirigée par une autorité supercompétente, le principe de Peter ne s'applique pas davantage que dans le cas d'une autorité incompétente. On peut même supposer que dans une telle hiérarchie, avec seulement trois niveaux, les emploés sont, soit compétents, soit sur le siège éjectable.

Par conséquent, il n'est pas possible de juger des mécanismes réels de la promotion si l'on ne tient pas compte de la compétence de l'autorité. Un incompétent bloqué peut être promu, si son chef est remplacé par un incompétent.
Voici le schéma que nous proposons

 Hiérarchie   supercompétente  compétente  incompétente 
employé
 supercompétent promuviréviré
 compétent promupromupromu
 incompétent virébloquépromu
 superincompétent viréviréviré

Nous proposons d'appeler ceci: hiérarchologie relativiste.

De tout ceci, nous pouvons conclure que la hiérarchologie Peterienne né décrit pas la réalité. D'où nous déduisons que Laurence J. Peter avait atteint son niveau d'incompétence en tant que hiérarchologue

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