Pas de martien à Andigné

En fait, il n'y a jamais eu de "martien" à Andigné. L'affaire dont il est question s'est déroulée sur la commune de Saint-Martin-du-bois, au lieu-dit "La Maison Neuve".
Pour étudier cette affaire, nous n'avons malheureusement pas les journaux locaux, mais seulement les livres des auteurs qui les auraient consulté.

En 1978, Eric Zurcher, utilise ce cas dans sa liste d'apparitions d'ufonautes

084 18.10.54         Entre Andigné et St Martin du Bois 49 G3   M. Albert Gérault
Note: 49 est, bien sûr, pour "Maine-et-Loire", et G3 pour ufonaute du groupe 3, c'est a dire velu.
(Eric Zurcher, Les apparitions d'humanoïdes, Alain Lefeuvre 1978, page 312)

En 1979, Michel Figuet, se base sur Ouest-France:

18 10 1954 heure non précisée D216. entre Andigné et Saint-Martin du-bois 49113 A3 M63/10

TÉMOIN. M. Albert Gérault. 15 ans. employé de ferme à Montguillon.
OBSERVATIONS.
a) Une lumière qui passe du vert au rouge. puis une « soucoupe » transparente dégageant une lueur rouge au sol.
b) Un petit être de 1 m 20 de haut. recouvert de poils de la tête aux pieds. avec deux gros yeux comme ceux d’un hibou.
DÉROULEMENT. Le jeune Albert Gérault circule à bicyclette sur la route d’Andigné à Saint-Martin-du-Bois. Il aperçoit une lumière qui passe du vert au jaune. Cette lueur descend par saccades et atteint la route. Pris de panique. le témoin se sent les jambes paralysées. La « soucoupe » est au sol, à l‘intérieur se trouve un petit être recouvert de poils de la tête aux pieds qui regarde Albert, ses yeux sont gros.
Brusquement, l’objet s'élève, provoque un souffle violent dans le dos du temoin et disparaît en direction du Lion d’Angers.
...
SOURCES. Ouest France du 20/10/1954, p.1.
(Michel Figuet,OVNI: Le premier dossier complet des rencontres rapprochées en France., Alain Lefeuvre 1979, p 182)

Ensuite Barthel et Brucker évacuent ce cas en une phrase.

Entre Andigné et St-Martin du bois, le 20 octobre, un jeune employé de ferme fit une étrange rencontre: Un visiteur de 1,20 m couvert de poils de la tête aux pieds, avec des yeux de hibou. Vous noterez au passage que même lorsqu'il s'agit d'un pari avec des copains, « le mimétisme extra-terrestre » puis ses ressources dans la faune à plume de notre planète.
Note: Aucune source indiquée. On ignore comment les auteurs sont arrivés à cette conclusion d'un pari avec des copains, peu compatible avec ce qu'on sait de la peur du témoin.
(Gérard Barthel et Jacques Brucker, La grande peur martienne, Nouvelles éditions rationalistes, Paris 1979, page 77)

En 1989 des enquêteurs anonymes réfutent l'explication de Barthel et Brucker.

20. Andigné - St-Martin-du-Bois (Maine et Loire), le 20 octobre 1954. Version B&B : pari... (p.77) Version LDLN: Nous avons rencontré Albert Gerault à son domicile. Il prétendit être le père du témoin qui lui-même serait mort depuis sept ans. La conversation fut presque impossible. M. Gerault dit à plusieurs reprises : "ça ne m’interesse pas". Son attitude nous semble plus être celle d'un témoin qui souhaite oublier que celle d'un joyeux plaisantin.
(La grande peur martienne: canular après enquète, Lumières dans la nuit n° 299, page 34)

En 1997 Jean Sider récuse Barthel et Brucker.

77 - 18 octobre, heure inconnue, Andigne/Saint-Martin-du-Bois, Maine-et-Loire.
Albert Gérault, 15 ans à l'époque.
Le témoin roule à bicyclette sur la D216. Soudain, il remarque une lumière qui passe du vert au jaune. Cette source lumineuse descend par saccades et atteint la route. Pris d'une grande frayeur, l'adolescent se sent paralysé au niveau des jambes. Un objet a atterri et à l'intérieur se trouve un petit être velu de la tête aux pieds, aux yeux comme ceux d'un hibou. Tout à coup l'objet décolle en provoquant un souffle violent que le témoin ressent dans son dos, et disparaît en direction du Lion d'Angers. Par la suite, le jeune homme resta prostré pendant plusieurs jours.
Source : Figuet, p. 182-183é
Nota : Barthel & Brucker expliquent cet incident comme étant le résultat d'un "pari" (donc, une blague), mais sachant qu'ils ont constamment truqué leurs "contre-enquêtes", nous ne pouvons plus leur accorder du crédit.
Note: Plutôt que de démontrer pourquoi l'affirmation de Barthel & Brucker n'est pas crédible, Sider se contente d'affirmer arbitrairement qu'ils ont constamment truqué leurs enquêtes, ce qui est faux.
La prostration du témoin, si elle est authentique, démontre d'ailleurs que le témoignage est vraisemblable. De plus, le même soir, un écolier d'Ille-et-Vilaine vécut en gros une expérience similaire (voir cas n°79).
Note: La prostration du témoin, et plus généralement sa frayeur montre seulement qu'il n'a pas inventé son histoire, pas que le petit être velu existait vraiment.
Quant au cas n° 79, c'est un témoignage anonyme, tellement semblable au cas d'Andigné qu'il semble l'avoir tout simplement copié.

Mais en 2014 Julien Gonzalez apporte d'autres précisions, d'après Le Courrier de l'Ouest du 21 octobre:

Entre Andigné et Saint-Martin du-Bois, Maine-et-Loire, 17 octobre 1954, 19h30.
M. Albert Gérault, 15 ans, employé de ferme à Montguillon.

Le jeune Albert Gérault. qui habite La Chapelle-sur-Oudon, mais travaille à Montguillon roulait à bicyclette sur la route de St-Martin-du-Bois à Andigné lorsqu’avant la Maison-Neuve, il aperçut dans le ciel un disque qui passait du vert au jaune en descendant par saccades vers le sol. Il en eut les jambes coupées. Il dit: « Le disque était transparent, à l’intérieur il y avait un homme de petite taille (1,20 mètre selon la seconde source) assis immobile. Ses yeux étaient gros comme des yeux de pigeon et il était couvert de poils, mais je ne sais si ce n’était un manteau. Il me fixait et j’étais terrifié. Cela dura au moins cinq minutes. Puis la lumière s’est éteinte et le disque s’est envolé. J’ai ressenti un souffle dans mon dos ». Affolé, le jeune Albert Gérault s’enfuit chez les Malaboeuf, fermiers à la Maison-Neuve, où il ne put faire le récit de son aventure qu’après quelques instants. Il demanda à son patron de partir maintenant assez tôt pour rentrer avant la nuit car il avait peur de revoir le petit homme poilu dans sa « soucoupe ».

Informations complémentaires:
1. Ce cas a souvent été daté du 18 octobre par les ufologues (M. Figuet, Sider) or Le Courrier de l’Ouest du 21 octobre 1954 précise bien « dimanche soir » soit le 17 octobre.
2. Dans La Grande Peur Martienne, MM. Barthel et Brucker affirment que ce cas est un canular. Or, en 1989, des enquêteurs de Lumières dans la Nuit ont rencontré Albert Gérault à son domicile. Il prétendit être le père du témoin qui lui-même serait mort depuis sept ans. La conversation fut presque impossible. M. Gérault dit à plusieurs reprises: « ça ne m‘intéresse pas ». Son attitude nous sembla plus être celle d’un témoin qui souhaite oublier que celle d’un joyeux plaisantin.
Note: L'explication de Barthel et Brucker est effectivement inappropriée, mais si les enquêteurs de LDLN savaient distinguer un homme de 50 ans, d'un homme de plus de 70, alors la psychologie du témoin qui se fait passer pour son père est sujette à caution.

Sources: Le Courrier de l’Ouest du 21 octobre 1954; Ouest France du 20 octobre 1954; Michel Figuet et Jean-Louis Ruchon. OVNI : le premier dossier complet des rencontres rapprochées en France, pages 182-183: Jean Sider, Le dossier 1954 et l’imposture rationaliste, page 208.
(Julien Gonzalez, RR3 - Le Dossier des Rencontres du Troisième Type en France, Le Temps Présent, 2014, pp 144-145)

Voyons donc les lieux de l'observation.

Donc le témoin, après sa journée de travail à Montguillon, rentrait à son domicile à La Chapelle-sur-Oudon. Cela se passait donc dans la soirée. Il devait descendre vers le sud pout traverser l'Oudon au lieu-dit "Port aux anglais", après avoir traversé le village de Saint Martin du bois.
L'observation aurait eu lieu, juste avant la ferme au lieu-dit, "la Maison Neuve", et nous pouvons demander à Google ce qu'on voit depuis le lieu supposé de l'observation.

La route est droite et l'horizon assez bien dégagé vers l'est.

Maintenant, il y a une difficulté sur la date. Selon Figuet, Ouest-France situe l'observation le 18, mais selon Gonzalez, Le Courrier de l'Ouest la situe le dimanche 17.
Mais ce jeune employé de ferme travaillai-t-il le dimanche? Ce ne serait pas la première fois que date donnée par un journal est fausse. Nous pourrions donc supposer que l'observation eut lieu la veille, samedi 16.
L'heure exacte est inconnue, mais ce jour là, le soleil se couchait vers 18H 11, et les premières étoiles apparaissaient vers 18H 45, la nuit étant complètement tombée vers 19 h 15.
Une indication utile est que le témoin demanda ensuite à son patron de pouvoir rentrer avant la tombée de la nuit. Notre cycliste a donc du faire son observation quand la nuit était déja tombée.
Or, si c'était bien le samedi 16, deux bolides ont été décrits, l'un, le plus observé, vers 21H 30, et l'autre vers 19H 30, heure qui conviendrait bien à un employé de ferme rentrant à vélo de son travail.
La description de l'arrivée de l'objet n'est pas incompatible avec un bolide: le mouvement par saccades s'explique bien par les variations de luminosité, quant aux couleurs elle sont souvent décrites à propos de bolides.
Donc ce pouvait être un bolide, bien que ce ne soit q'une hypothèse. Le catalogue de Patrick Gross mentionne cinq observations à cette heure là, dont les mouvements allégués sont malheureusement assez disparates, en sorte qu'on peut juste conclure à la visibilité d'un bolide à cette heure là, sans qu'on sache vraiment s'il était visible depuis la localité d'observation.

La coïncidence de l'observation du petit être avec celle du bolide ne doit pas être éliminée pour cause d'improbabilité: Le 18 octobre on signale aussi un petit être, juste après l'observation d'un bolide. A Quarouble, le 10 septembre, c'est l'inverse: c'est juste après observé deux êtres que le témoin observe un bolide. Et surtout, à Quarouble comme ici, si la coïncidence n'avait pas eu lieu, le cas nous serait resté inconnu.
La difficulté vient ensuite: l'objet aurait ensuite été observé au sol, et, selon le témoin « Le disque était transparent, à l’intérieur il y avait un homme de petite taille assis immobile ». Un disque transparent? En pleine nuit? C'est ensuite que le témoin laisse comprendre que le disque était lumineux: « Puis la lumière s’est éteinte et le disque s’est envolé ».
Et ça ne s'arrange pas avec la description de l'ètre: « Ses yeux étaient gros comme des yeux de pigeon et il était couvert de poils, mais je ne sais si ce n’était un manteau ». A quelle distance était le témoin pour pouvoir ètre sûr de ces détails?
Quant au comportement du petit être, il n'est vraiment pas compatible avec celui d'un pilote de soucoupe effectuant une quelconque mission nocturne: « Il me fixait et j’étais terrifié. Cela dura au moins cinq minutes ».
Ce n'est pas tout, le témoin ajoute: « J’ai ressenti un souffle dans mon dos ». Or, si effet physique il y avait réellement eu, c'est sur son visage que le témoin aurait du ressentir un souffle. Ce "souffle" dans son dos, s'apparente à un effet physiologique, genre "chair de poule", et doit être incriminé non à l'objet, mais à la terreur ressentie par le témoin, tout comme "les jambes coupées", car si le témoin avait été paralysé, il n'aurait pas pu aller se réfugier ensuite à la ferme.
Nous avons donc là un témoin très impressionnable, qui serait resté prostré plusieurs jours après son observation, et qui n'osa plus rouler de nuit.

Dans ces conditions, la crédibilité de ce témoignage, quant aux détails donnés, est faible. Nous sommes seulement sûrs que ce n'était pas un canular du témoin, encore qu'on puisse imaginer une farce faite au témoin, à l'aide d'une fusée de feu d'artifice (pour l'objet) et, par exemple, d'un petit mannequin, éclairé par une lampe. A l'extinction de cette lampe, le témoin aurait tout naturellement imaginé l'envol du disque. Mais ceci est encore une hypothèse.

carte Michelin
hibou grand-duc
Une autre hypothèse pour le petit être, nous est fourni par la description des yeux "comme ceux d’un hibou". Et si c'était tout simplement un hibou? Vu les conditions d'observations, il n'était pas évident de distinguer, à distance, un être couvert de plumes d'un ètre couvert de poils. Le hibou étant un rapace nocturne, son observation à la tombée de la nuit est tout à fait possible. La taille alléguée ne doit pas faire illusion: elle ne vaut que ce que vaut l'estimation de la distance par le témoin, c'est à dire la nuit, par un jeune homme effrayé. De plus, l'oiseau étant probablement perché sur un support, un poteau de cloture, par exemple, il n'est plus étonnant qu'un hibou (le grand-duc fait 75 cm, et le moyen duc, la moitié) soit décrit comme un être velu de 1.20 m.
D'autre part l'être regarde le témoin pendant cinq minutes. Qu'est ce qui est le plus probable? Qu'un "martien" ait fait des milliards de kilomètres rien que pour effrayer un jeune homme pendant cinq minutes, ou que ce même jeune homme ait, dans l'obscurité, pris un hibou pour un martien?
On peut objecter que l'hypothèse du hibou ne rend pas compte de toutes les données de l'observation. C'est vrai, mais encore faudrait il qu'on connaisse les vrais données, car, faute d'enquête, nous n'en avons que la rumeur, à travers des journalistes qui, souvent, se copient les uns les autres.

Donc nous n'avons aucune explication solide. Rien que des hypothèses. Mais si nous ne pouvons pas douter de la bonne foi du témoin, nous ne pouvons pas non plus prendre pour argent comptant le témoignage bizarre d'un adolescent effrayé. Son observation d'un être immobile ne correspond pas du tout ce que nous connaissons des occupants d'engins, même si l'engin se révèle être un fourgon, un engin agricole ou un hélicoptère. Au contraire, ce genre d'être est l'indication d'un objet inerte:
A Walscheid (Moselle) une troupe de petits êtres, restant immobiles malgré les sommations, se révèlent être des chrysanthèmes emmailotés contre le froid.
A Montabon (Côte-d'Or), un martien continuait de regarder fixement ses agresseurs qui venaient de tirer deux coups de fusil sur lui. S'approchant, ils découvrirent un vieux tronc d'arbre dont un vert luisant figurait l'oeil.
A Binic (Cotes du nord), le petit être immobile semblait attendre les témoins qui en s'approchant le reconnurent pour une bouteille de gaz.
Bien sûr, une bouteille de gaz ne s'envole pas, ni un vieux tronc d'arbre, ni un pot de chysanthèmes, alors qu'un hibou le peut.

Finalement, nous ne savons pas bien ce qu'était ce fichu pilote velu, mais nous savons ce qu'il n'était pas: un pilote velu de soucoupe volante, justement.

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Dernière mise à jour: 26/04/2018