1987 Félix Benoit croit au comte de Gabalis Il a donc écrit HÉRÉSIES ET DIABLERIES À lYON et alentours, dans l'esprit de ses autres ouvrages comme Lyon secret, ou Lyon insolite et superbe. Les amateurs de mystère sentant le soufre seront content, les amateurs de rigueur historique, peut-être moins. L'auteur a eu l'idée d'insérer, au chapitre "un diable peut en cacher un autre", un petit dictionnaire de 26 articles, en 28 pages, de "Affronteur", à "Zoopsie", dans la lignée du Dictionnaire infernal de Collin de Plancy, mais avec un seul article par lettre. Nous n'avons pas vérifié les autres articles, mais nous avons pu constater qu'à la lettre M, il ny a quasiment rien de vrai. M - MAGONIE Une étrange affaire eut lieu à Lyon dans les temps obscurs du haut Moyen Age, vers l'an 840 pour être plus précis. Note: Soyons encore plus précis! 840, c'est l'année de la mort d'Agobard. Le fait qui fut la source de cette légende survint vers 815. Sur la place dite aujourd'hui du Change, un engin volant se pose et trois hommes et une femme en descendent. La surprise des Lyonnais, traumatisés par des siècles d'invasions, fut profonde devant un tel spectacle. Pas question de rencontre du troisième type, mais plutôt d'une peur terrifiante poussant la foule à allumer un feu et à y jeter les curieux voyageurs aux cris de " Sorciers de Magonie ". Note: La seule chose de vrai dans ce qui précède, est qu'il y avait trois hommes et une femme. C'est Antoine Francois Delandine qui, en 1784, situe l'action sur la place du change, qui ne s'est appelé ainsi qu'au début du XVIe siècle. Aucun engin ne s'est posé, et il n'y a aucune raison de supposer le traumatisme de siècles d'invasion, d'autres provinces ayant subi pire. Il n'y eut donc pas de peur terrifiante, et la foule n'alluma pas de feu. Le comte de Gabalis, dans son cinquième entretien sur les Sciences occultes, a d'ailleurs conté cette histoire extraordinaire : « Le fameux cabaliste Zedechias se mit dans l'esprit, sous le règne de Pépin, de convaincre le monde que les éléments sont habités par un grand nombre de peuples. L'expédient dont il s'avisa fut de conseiller aux Sylphes, détenteurs des forces élémentaires, de se montrer en l'air à tout le monde ; ils le firent avec manificence. On voyait dans les airs ces créatures admirables en formes humaines, tantôt rangées en bataille, marchant en bon ordre au se tenant sous les armes ou campées sous des pavillons superbes, tantôt sur des navires aériens d'une structure admirable dont la flotte volante voguait au gré des zéphirs. Qu'arriva-t-il? Pensez-vous que ce siècle ignorant s'avisait de raisonner sur la nature de ces spectacles merveilleux. Le peuple crut d'abord que c'était des sorciers qui s'étaient emparés de l'air pour y exciter des orages et pour faire grêler sur les moissons. Les savants théologiens et jurisconsultes furent bientôt de l'avis du peuple. Les empereurs le crurent aussi. Le sage Charlemagne, et après lui Louis le Débonnaire, imposèrent de graves peines à tous les prétendus tyrans de l'air. Les Sylphes, voyant le peuple, les pédants et les têtes couronnées se gendarmer ainsi contre eux, résolurent, pour faire perdre cette mauvaise opinion qu'on avait de leur flotte innocente, d'enlever des hommes de toutes parts, de leur faire voir leurs belles femmes, leur République, bref leur faire visiter la Magonie et puis les remettre à terre, en divers endroits du monde. Ils firent comme ils l'avaient projeté et le peuple, qui voyait descendre ces hommes, y accourait et, prévenu que c'était des sorciers qui venaient jeter des venins sur les fruits et dans les fontaines, entraînait ces innocents au supplice ». Note: Le comte de Gabalis n'a pas plus existé que le cabaliste Zedechias. L'histoire précédente est une fiction imaginée par l'abbé Montfaucon de Villars pour se moquer de la croyance à la Kabbale. Revenons à Lyon, place du Change, où nos sorciers de Magonie sont en bien fâcheuse posture. Heureusement pour eux, saint Agobard, moine et évêque de Lyon, s'interpose. Ayant écouté l'accusation (sorcellerie) et la défense (enlèvement par les Sylphes), il repousse ces allégations. Ces hommes n'ont pu descendre du ciel! Aucune description de leur vaisseau n'est parvenue jusqu'à nous, et nous n'en savons pas davantage sur la Magonie… Ils n'étaient ni sorciers, ni place du change. Agobard qui était l'archevèque, eut l'occasion de les voir amenés ligotés dans une assemblée qu'il présidait. Ils étaient accusés d'être tombés de vaisseaux aériens, et ne se prétendirent pas enlevés par les sylphes, inconnus à l'époque. Agobard ne démontra pas l'impossibilité de leur voyage. Il soumit leurs accusateurs à un interrogatoire serré, et les confondit. Il n'y avait jamais eu de vaisseaux aériens, et la Magonie n'était qu'une croyance lyonnaise. L'approche de l'An 2000 verra néanmoins le retour de voyageurs de Magonie ! Les extraterrestres et assimilés n'ont pas fini leurs incursions folles. On na pas vu plus de voyageurs de Magonie que de père Noël céleste. Cette prédiction ratée semble s'inspirer des fausses terreure de l'an 1000. Le seul vrai sujet d'inquiétude fut la bogue de l'an 2000, qui risquait de faire confondre l'an 2000 et l'an 1900. SOURCE: Félix et Bruno BENOIT, HÉRÉSIES ET DIABLERIES À lYON et alentours, Horvath, 1987, p. 86-87 Remarques: L'auteur ne donne pas ses sources. On a seulement droit à une bibliographie finale, assez courte, où apparaissent le Dictionnaire infernal de Collin de Plancy, et La sorcellerie lyonnais de Paul Leutrat. Ces deux ouvrages parlent effectivement de l'incident cité, mais Le comte de Gabalis, de Montfaucon de Villars semble avoir été occulté. C'est pourtant la source principale. |
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