1784 David Bourgeois extrapole de façon vraisemblable   Un bruit absurde se répandit à peu près dans le même tems à Lyon & dans les provinces voisines, que les récoltes étoient détruites & perdues par des enchanteurs; & que, comme tout ce qui est perdu doit se retrouver, ces enchanteurs en avoient le secret. Ils savoient exciter la grêle, la foudre & les tempêtes pour ruiner & détourner les biens de la terre, & ils faisoient trafic de leur art en vendant les bleds gâtés à des habitans d’un certain pays appelé Magonie. Ces gens-là, disoit-on, venoient tous les ans par le milieu des airs avec des navires, pour charger tous les grains gâtés par la tempête dont ils payoient le prix aux enchanteurs. Trois hommes & une femme inconnus passèrent alors à Lyon; le peuple s'imagina qu'ils étoient magoniens, & qu'ils seroient tombés de leurs navires. Il les saisit , les maltraita & les chargea de fers. Ils furent présentés quelques jours après pardevant Àgobard , évêque de Lyon , comme des criminels dignes d’être lapidés. Après bien des discours & des raisonnemens, la vérité fut victorieuse , & les accusateurs demeurèrent confus. Agobard composa à cette occasion, en 833, un traité pour dissuader le peuple de cette erreur & de plusieurs autres. Ils croyoient aussi que Grimaud , duc de Benevent , ennemi de l'empereur Charles , avoit envoyé des hommes qui répandoient des poudres sur les champs , les montagnes , les prés & les fontaines , pour empoisonner & faire périr les bœufs. Le docte évêque finit son traité par ces paroles remarquables. « Une si grande folie accable déjà le misérable monde, que les chrétiens ajoutent foi maintenant à des choses si absurdes , que qui que ce soit n'auroit pu les persuader ci-devant aux payens mêmes ». NAVIRES AERIENS SOURCE: David Bourgeois, Recherches sur l'art de voler, Paris, 1784, p.19-20 Remarques: L'auteur extrapole de façon vraisemblable, mais ses extrapolations restent des suppositions. Agobard n'affirme pas que tout ce qui est perdu doit se retrouver, ni que les enchanteurs en avaient le secret. Il ne dit pas qu'on croyait que les Magoniens venaient tous les ans, on devine simplement que ce devait être à chaque récolte gatée par la grêle. Il ne dit pas non plus que les quatre prisonniers étaient inconnus, mais c'est logique. Par ailleurs, les sources ne sont pas citées. Mais la date de 833, en même temps que l'assertion que les Magoniens venaient tous les ans se trouvent tant chez Le Gendre, que chez Naudé. Comme l'auteur parle aussi, comme Naudé, de Grimaud, et cite comme lui la conclusion finale, la source est probablement Naudé, à ce détail près que La Magodie a été corrigée en Magonie.