1751 Augustin Calmet résume encore le livre d' Agobard
Dom Augustin Calmet avait déjà parlé de de la grêle et du tonnerre dans son Histoire universelle sacrée et profane. Il récidive 10 ans plus tard en donnant plus de détails.
Le fameux Agobard (a) Archevêque de Lyon , qui vivoit sous l'Empereur Louis le Débonnaire , a écrit un Trairé contre certains superstitieux de son tems, qui croyoient que les tempêtes, la grêle & les tonnerres étoient causées par certains Sorciers qu'ils appelloient Tempétiers Tempestarios , qui élevoient la pluie dans l'air , causoient les orages & les tonnerres , & amenoient la stérilité sur la terre. Ils nommoient ces pluies extraordinaires aura levatia, comme pour marquer qu’elles étoient élevées par la force de la Magie. En ce pays-ci le peuple appelle encore ces pluies violentes alvace. Il y avoit même des personnes allez prévenues pour se vanter de connoître de ces Tempêtiers, qui avoient la puissance de conduire ces tempêtes où ils vouloient , & de les détourner quand ils vouloient. Agobard en interrogea quelques-uns ; mais ils furent obligés de convenir qu'ils n'avoient pas été présens à ce qu’ils racontoient.
Note: Agobard dit qu'on lui signala un de ces prétendus témoins, qu'il arriva à le retrouver, et qu'il lui avoua n'avoir pas été présent.
Agobard soutient que tout cela est l'ouvrage de Dieu seul ; qu’à la vérité les Saints avec le secours de Dieu ont souvent opéré de pareils prodiges ; mais que ni le Démon ni les Sorcieres ne peuvent rien faire de femblable, Il remarque qu'il y avoit parmi son peuple des perfonnes superstitieuses , qui étoient très ponctuelles à payer ce qu’ils nommoient
Canonicum , qui étoit une espece de tribut qu'ils offroient à ces Tempêtiers, pour les empêcher de leur nuire, pendant qu'ils refusoient la dîme aux Prétres, & l'aumône à la veuve, à l'orphelin & aux autres indigens.
Il ajoute que depuis quelque tems il s'étoit trouvé des gens assez dépourvûs de sens, pour publier que Grimoalde Duc de Bénevent avoit envoyé en France des hommes chargés de certaines poudres qu'ils avoient répandues sur les champs, les montagnes, les prairies & les fontaines, & avoiens fait mourir un très grand nombre d'animaux. On en arrêta plusieurs , qui avouerent qu’ils étoiens chargés de cette sorte de poudre ; & quoiqu'on leur fit souffrir divers fupplices, on ne put les obliger à se rétracter.
D'autres assuroient quil y avoit un certain pays nommé Mangonie , où il y avoit des vaisseaux qui étoient portés par les airs, & qui en enlevoient les fruits; que les Sorciers avoient fait tomber des arbres pour les porter en leur pays. Il dit de plus, qu’un jour on lui présenta trois hommes & une femme , que l'on disoit être tombés de ces vaisseaux qui voguoient dans lair. On les tint quelques jours dans les liens, & enfin ayant comparu devant leurs Accusateurs, ceux-ci après plusieurs contestations. furent obligés de reconnoître qu'ils ne sçavoient rien de certain sur leur enlevement, ni sur leur prétendue chûte du vaisseau porté dans l'air.
Note: dans le livre d'Agobard, il n'est pas question de plusieurs contestations, mais d'une longue discussion (entendez: un interrogatoire serré). Il n'est pas question non plus d'un enlèvement, qui semble sorti du Comte de Gabalis.
Charlemagne (b) dans ses Capitulaires, & les Auteurs de son tems parlent aussi de ces Sorciers Tempêtuaires, Enchanteurs , Caucolateurs, &c. & ordonnent qu'on les réprime ; & qu’on les châtie sévérement.
(a) Agobard, de grandine
(b) vide Baluzii notas in Agobard. p. 68.69.
Note: orthographe respectée.
SOURCE: Dom Augustin Calmet, Traité sur les apparitions des esprits, Paris, 1751, p. 144-146
Remarques:
Le fait que Dom Calmet cite les notes d'Etienne Baluze, ajouté à ce qu'il résume à peu près correctement le livre d'Agobard, montre qu'il l'a bien lu d'après l'édition Baluze. Il traduit cependant Magonia par Mangonie, ce qui n'est peut-être pas une erreur, mais un simple parti pris. Par contre, la mention de l'enlèvement, qui n'apparait que quatre ans après l'édition Baluze, montre aussi que Dom Calmet a connu, directement ou indirectement l'histoire imaginée par Montfaucon de Villars.
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