"L'observation" de San José de Valdéras

Une affaire qui paraissait sérieuse

Informaciones 2-6-1967
Le "scoop" d'Informaciones
Une des photos de San José de Valdéras
Une des photos de San José

Le 2 juin 1967, le journal "Informaciones", journal du soir, annonçait l'observation, dans la soirée de la veille, jeudi 1 juin, d'une soucoupe volante au dessus du château de San José de Valderas, en banlieue de Madrid.
SOUCOUPES VOLANTES SUR MADRID ?
DES CENTAINES DE PERSONNES LES ONT "VUES" HIER DANS LA BANLIEUE DE LA CAPITALE.

C'était vraiment sen-sa-tion-nel! De nombreux témoins avaient pu observer pendant de longues minutes un énorme engin lenticulaire baignant dans une lumière orangée, et il y avait même des photos!

Ce scoop était rapportée par... un certain San Antonio (reporter au journal. ça ne s'invente pas). Les photos montraient que l'engin portait sur sa face ventrale un mystérieux dessin évoquant le schéma d'un changement de vitesse pour le lecteur moyen, mais évoquant le sceau d'Ummo pour les initiés. Des photos d'une incursion des "ummites"!

Et ce n'était pas tout! Le journal "Pueblo" du même jour confirmait:
Dans la nuit d'hier, plusieurs personnes ont appelé notre Rédaction prenant de l'intérêt à nous donner des informations sur un étrange objet qu'ils avaient vu survoler la promenade d'Extramadure. La passage de la "soucoupe" a été témoigné, semble-t-il, en divers faubourgs : San José de Valderas, Aluche, Santa Monica, Mirador de la Casa de Campo, etc..

Et le journal "Madrid" du lendemain renchérissait:
Don Fernando Sesma l'affirme
LA SOUCOUPE VOLANTE VUE A MADRID PROVIENT DE LA PLANETE URANO
(1)

Comment douter d'une observation rapportée par tant de témoins, par plusieurs journaux, avec des photos, et la caution du "professeur" Sesma?

San Antonio avait reçu cinq photos d'un mystérieux photographe, apparemment un simple amateur qui se trouvait sur place avec sa fiancée et eut le réflexe d'utiliser son appareil.
Mais un amateur qui avait cependant réussi à développer ses photos et à en faire des tirages suffisamment vite pour qu'elles paraissent dans le journal du lendemain. Ils avait laissé les tirages à disposition de San Antonio dans un laboratoire de photographie

Mais curieusement... on ne retrouva jamais le photographe.

Mais un autre photographe, qui signait Antonio Pardo - autant dire Jean Dupont - écrivit deux mois plus tard au journaliste Marius Lleget, membre du « Centre d'études interplanétaires " (CEI), qui venait de publier "Mythe et réalité des soucoupes volantes". Cet Antonio Pardo joignait deux clichés et un récit très circonstancié.

Un des mystérieux tubes de Santa Monica
Un des mystérieux tubes

Mieux, L'objet observé à San José aurait atterri à Santa Monica, près du restaurant "La Ponderosa", et Antonio Pardo mentionnait d'autres témoignages et la présence d'étranges tubes métalliques. D'étranges tubes qui contenaient (au moins pour l'un d'entre eux) des lamelles d'une fine matière plastique portant le sceau d'Ummo

On ne retrouva jamais Antonio Pardo.

L'affaire se corsa quand on apprit qu'un certain Henri Dagousset écrivit à divers commerçants en offrant 18 000 pesetas pour chacun de ces tubes (plus 7000 pesetas au commerçant qui aurait permis de retrouver le détenteur)

Vous aviez peut-être déja deviné qu'on ne retrouva jamais Henri Dagousset.

Un caso perfecto, document Editorial Bitácora
édition espagnole
Un caso perfecto, version française
édition française

José Luis Jordan Péña, le témoin qui l'année précédente avait déjà observé l'OVNI d'Aluche, offrit son aide en rapportant d'autres témoignages.
Cette affaire paraissait irréfutable. Il semblait y avoir eu beaucoup de témoins, des photos prises indépendamment, des traces qui intéressaient des gens importants.
De plus, cette observation recoupait celle de l'atterrissage du 6 février 1966, à Aluche, non loin de San José. Atterrissage qui avait laissé des traces indubitables

Antonio Ribera et Rafael Farriols furent tellement convaincus que, l'année suivante, ils en firent un livre:"Un cas parfait"(2).

Parfait? Voire. Les photos, étrangement mal développées, ne se suivaient pas sur le négatif. Elles ne semblaient pas avoir été prises par un homme debout. Contre toute logique, l'engin n'était jamais cadré au centre.
Le diamètre apparent de l'objet sur les clichés était bien plus grand que dans le récit d'Antonio Pardo. Aucun des nombreux témoins de ce jeudi 1 juin n'apparaissait sur les photos, pas plus que l'un des photographes qui aurait dû se trouver dans le champ de l'autre. Et pourquoi les deux photographes restaient ils introuvables ?

Antonio Ribera se donna beaucoup de mal pour plaider la réalité du cas. Il insista sur le fait que les déclarations des témoins se recoupaient, qu'elles avaient été enregistrées, qu'il y avait deux photographes indépendants, et que les photos recoupaient les témoignages. Il n'avait pas remarqué que les témoignages précis qui recoupaient les photos, venaient tous de la même personne: José Luis Jordan Péña...

Patatras! L'affaire s'écroule

Il y eut un premier couac en 1972. Dans son numéro du mois d'août, la revue Stendek sortit une étude du météorologiste Oscar Rey Brea tendant à montrer que les photos de San José étaient truquées. Après calcul, il concluait qu'il n'y avait en fait qu'un seul photographe qui avait photographié une maquette en utilisant un pied (3).

traitement de l'image de San José
traitement de l'image

En 1977, Claude Poher, du GEPAN, montra qu'un traitement approprié des photos prises à San José mettait en évidence le fil de suspension de la soucoupe (un cliché de ce traitement fut exposé au stand du Gepan lors d'un salon du Bourget).
Cela expliquait pourquoi l'engin était toujours cadré bizarrement: pour ne pas montrer le support de la maquette (probablement une canne à pêche). Selon Poher, la soucoupe n'était qu'un assemblage de deux assiettes en plastique. Les deux photographes n'en faisaient qu'un: on pouvait superposer l'un des clichés pris par le premier à l'un des clichés pris par le second. Les photos de San José n'étaient donc qu'une supercherie (4).

Une autre enquête fut faite par William Spaulding, expert en analyse photo du Ground Saucer Watch., à partir d'une copie provenant d'Antonio Ribera. La aussi le traitement révéla un fil de suspension (5)

Ce détail du fil de suspension a été contesté depuis. L'enquête de la Guardia civile espagnole sur cinq négatifs originaux, à confirmé que les négatifs étaient authentiques (ce qui n'avait jamais été contesté) et n'a pas trouvé trace du fil de suspension. Il paraîtrait qu'il s'agissait en fait d'une rayure sur le négatif. Une rayure qui se serait trouvé opportunément à l'endroit pile ou devait se trouver le fil de suspension, et avec la bonne longueur! Mais cette authenticité des négatifs ne prouvent rien contre l'hypothèse d'une maquette, suspendue ou non

Les "ummites", qui avaient eu le temps d'apprendre leur métier, depuis leur premier contact avec Fernando Sesma, ne cherchèrent pas à nier le faux, ils expliquèrent même que cela entrait dans leur stratégie:
" Des années plutôt, mes frères ont diffusé, conjointement à des arguments en faveur de la thèse de l'identité ummiaoo, de fausses preuves qui pouvaient servir de couverture face à un degré élevé de crédulité de la part du réseau social de la Terre." ( lettre D116 du 23 mai 1979 )
Peut on en déduire que la fausseté des photos prouvait l'authenticité des "ummites"? Hum! A en croire ce raisonnement les "ummites" auraient volontairement fabriqué des photos truquées pour les divulguer si leur incursion à San José avait été trop remarquée. L'ennuyeux, c'est que ce sont précisément les photos qui déclenchèrent l'affaire de San José.

Néanmoins, certains ufologues comme Antonio Ribera ou René Fouéré, du GEPA (et d'autres encore vivants), refusaient de se rendre à l'évidence: il fallait qu'on leur prouve que l'objet qui avait évolué le 1er juin 1967, sous les yeux de témoins dignes de foi, avait été fabriqué par un terrestre mystificateur (6).
Mais quels témoins « dignes-de-foi » ? Leurs existence ne tenaient qu'à la bonne foi de ceux qui les avaient vus, c'est-à-dire José Luis Jordan Péña et Antonio Pardo, le pseudo-photographe. Malheureusement, le style de l'introuvable Antonio Pardo était identique à celui de José Luis Jordan Péña, comme l'a signalé le psychiatre CarIos Berche Cruz, du CEI (7). De plus, il possédait un laboratoire photo et un appareil du même type. Il y avait de quoi avoir des doutes...

Aujourd'hui, il n'y a plus le moindre doute

Manuel Carballal, document Carlos Orion
Manuel Carballal
reconstitution de la photo de San José, document Editorial Bitácoral
La reconstitution

Aucun témoin objectif de l'observation n'a été retrouvé. Comme l'a constaté l’enquêteur Manuel Carballal, toutes les personnes interrogées renvoient vers d'autres témoins supposés ou vers le livre de Ribera et Farriols, ou encore le journal du lendemain, sans avoir rien vu elles même. Tous les témoignages et documents étaient en fait l'oeuvre de José Luis Jordan Péna, qui d'ailleurs avait aussi mis en scène le pseudo atterrissage d'Aluche (il avait même répandu de la poussière radioactive).

Il a expliqué en 1996, les détails de sa mystification à Manuel Carballal, expliquant que pendant que son ami Vicente Ortuño tenait le support, il avait pris les photos en utilisant volontairement un film rapide et l'avait développé pour obtenir une forte granulation afin de faire disparaître le fil de suspension
Comme toutes photos n'étaient pas réussies (on voyait parfois les mains de son compère), il dut couper le film pour sélectionner les meilleurs clichés

Quant aux mystérieux tubes, c'étaient des étuis de thermomètre, dans lequel il avait placé des rubans de Tedlar, un fluorure de polyvinyle fabriqué par Dupont de Nemours, et que lui avait procuré un ingénieur de la NASA se trouvant alors en Espagne
Sur ses indications, Manuel Carballal, a fabriqué une maquette du même type, et l'a photographié dans les mêmes conditions devant le château de San José (8)

Nous avions personnellement fait ce genre de photo en 1986, en nous basant sur l'analyse de Claude Poher, comme on peut le voir plus bas. C'est presque trop facile...

Faite votre soucoupe vous même!

matériel
un peu de matériel...
soucoupe
...et voila le résultat

Pourquoi vous contenter de minables photos de soucoupes en noir et blanc, quand vous pouvez en avoir de splendides? Faites les donc vous même! (on n'est jamais si bien servi...)

Recette: deux assiettes en plastiques, du papier abrasif, un tube de colle, un peu d'adhésif noir ou un feutre noir, une paire de ciseaux, du fil de pêche force 400 g et un support.

Poncez les assiettes pour leur donner un aspect mat, collez-les l'une sur l'autre, découpez le symbole d'Ummo dans l'adhésif et collez-le sous l'assiette du dessous. Vous pouvez rajouter une coupole à l'aide d'un couvercle de moulin à café coupé à la hauteur voulue. Vous pouvez aussi imiter une soucoupe vénusienne en rajoutant trois moitiés de balles de ping-pong en guise de train d'atterrissage.

Pour suspendre l'engin à son support, reliez trois brins de fil, écartez-les et posez l'engin sur l'étoile ainsi réalisée. Attachez les trois brins au support en prenant soin de laisser suffisamment de hauteur pour que le support ne soit pas dans le champ. Photographiez a votre aise, en utilisant une grande profondeur de champ, c'est à dire un diaphragme réduit.

Attention à l'éclairage: des ombres dures trahissent la maquette, d'où l'intérêt des assiettes translucides. Éventuellement, un éclairage supplémentaire à l'aide d'un miroir ou d'un projecteur adoucira les ombres.
Le fil de force 400 g est quasiment invisible. Vous pouvez faire encore plus invisible avec du fil de kevlar (celui qui sert à jouer à la psychokinèse). Votre photo est prête à affronter le traitement d'image des experts. Vous voilà prêt à mystifier les ufologues du monde entier...
sauf un !

Notre "fake"
bouton fake
Cliquez

Aujourd'hui, avec la numérisation, le traitement et l'incrustation d'image permettent de faire à peu près n'importe quoi.
Alors pourquoi nous priver de transporter à San José de Valdéras, la soucoupe que nous avions photographié à Lille?
Pourquoi nous priver de la couleur?
Et pendant que nous y sommes, pourquoi nous priver de l'observer en mouvement?
Et hop, voila...


Notes et références

(1) Recherches de Manuel R. à la Biblioteca Nacional. Article 11-1

(2) Antonio Ribera, Rafael Farriols, Un caso perfecto, Barcelone, Ed. Pomaire S.A., 1968.
Edition française: Preuves de l'existence des soucoupes volantes, De Vecchi, 1975.

(3) Oscar Rey Brea, "Algo sobre las fotografias del supuesto Ovni de San Jose' de Valderas", Stendek No. 9, august 1972, pp. 5-11.
(partiellement traduit dans: « Les photographies de San José de Valderas étaient truquées », Phénomènes Spatiaux, n° 51, mars 1977. (en fait, après la publication des conclusions de Claude Poher dans lnforespace n° 32).

(4) Claude Poher, « Les observations d'Aluche et de San José de Valderas ainsi que l'affaire Ummo : une supercherie de taille!»
- "lnforespace" n° 32, mars 1977
- "Lumières dans la nuit", n° 166, juin 1977, pp. 3-7.
Claude Poher, "Remarks on Aluche, San Jose de Valderas and the Ummo Affair - a Monstrous Hoax!", CUFOS Bulletin, spring 1977, pp. 2-7;

(5) William Spaulding, "Computer Photographic Analysys - San Jose de Valderas, Spain 1967",CUFOS Bulletin, spring 1977, pp. 11-13.

(6) René Fouéré, avant-propos de Phénomènes Spatiaux, n° 51, mars 1977

(7) Martine Castello. Philippe Chambon. Isabelle Blanc, La Conspiration des étoiles. Robert Laffont. 1991. p. 149.

(8) Manuel Carballal, "Los secretos de Ummo", Enigmas n° 8, aout 1977

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