483 avant JC
Rome, prodiges mal renseignés, condamnation d'une vestale
En réalité: renseignements insuffisants, psychose et barbarie des romains

vers 9 avant notre ère, Tite Live raconte comment de fumeux prodiges firent assassiner une vestale:
Accessere ad aegras jam omnium mentes prodigia caelestia, prope cotidianas in urbe agrisque ostentantia minas; motique ira numinis causam nullam aliam vates canebant publice privatimque nunc extis nunc per aves consulti, quam haud rite sacra fieri: qui terrores tamen eo evasere, ut Oppia, virgo vestalis, damnata incesti poenas dederit
À cette funeste disposition des esprits, se joignirent des prodiges célestes qui, presque chaque jour, à la ville et dans la campagne, annonçaient de nouvelles menaces. Les devins, que consultent et l'état et les particuliers, sur les entrailles des victimes et sur le vol des oiseaux, déclarent que la colère des dieux n'a d'autre cause que l'inexactitude apportée dans l'accomplissement des rites sacrés. Ces terreurs eurent cependant pour résultat la condamnation de la Vestale Oppia, qui paya de sa mort la violation du voeu de chasteté.
(Livius, liv. II, ch. XLII)

vers 8 avant notre ère, Denys d'Halicarnasse expose les faits plus complètement:
I...Ainsi, on élut consuls pour l'année suivante Marcus Fabius, fils de Caeson, frère cadet du consul qui présidait à l'assemblée, et Lucius Valérius, fils de Marcus, lequel avait accusé Cassius de tyrannie et l'avait fait condamner à mort quoiqu'il eût été trois fois consul...
VII. Pendant que ces choses se passaient au camp, il parut à Rome divers prodiges qu'on regarda comme autant de marques de la colère des dieux. On y entendit des voix extraordinaires et l'on vit des spectacles surprenants. Suivant l'explication des devins et des interprètes des choses sacrées qui s'appliquèrent à examiner ces signes, ils tendaient à faire voir que quelques-unes des divinités qu'on honorait à Rome selon les lois de la patrie, étaient justement irritées de ce que les fonctions de leur culte ne s'exerçaient pas avec toute la pureté et toute la sainteté requises dans les ministres. des autels.
VIII. On fit d'exactes perquisitions, de tous côtés, et avec le temps certaines personnes déclarèrent aux pontifes qu'une des vierges commises à la garde du feu sacré, nommée Opimia, avait perdu sa virginité et souillait les choses saintes. Ceux-ci découvrirent par la torture et par d'autres voies que le fait était véritable et l'accusation bien fondée: ils dépouillèrent la vestale de ses bandelettes et autres ornements, ils la conduisirent par le milieu de la place publique, et l'enterrèrent toute vive dans une fosse souterraine pratiquée dans l'enceinte des murs. A l'égard des deux hommes qui furent convaincus d'avoir corrompu cette vierge, ils les firent fouetter publiquement et les punirent de mort tout aussitôt. Après ces châtiments, les entrailles des victimes furent plus favorables et les sacrifices plus heureux: enfin les devins assurèrent que la colère des dieux était apaisée.

(Denys, liv VIII, ch 14)
Note: Marcus Fabius et Lucius Valérius furent consuls en 483 av JC.

1557, Conrad Lycosthènes, résume sans qu'on n'y voit plus de rélation:
Mundi 3383. ante Christum 480.
Quotidie coelestia prodigia Romae et in Agris visa sunt, minas ostentantia. Mox Oppia virgo Vestalis, quam tamen alii Popiniam, alii Popiliam vocant, incesti damnata poenas dedit.

An 3383 de la création. 480 avant Jésus-Christ
On vit quotidiennement à Rome, des prodiges célestes, manifestant des menaces. Peu après la vestale vierge Oppia, que cependant d'autres appellent Popinia, d'autres Popilia, expia la peine de son sacrilège.

(Lycosthenes, p 63)

Analyse:
Des prodiges célestes, des voix, des spectacles surprenants! c'est bien vague. Et en plus, des prodiges presque chaque jour, à Rome comme à la campagne, c'est à dire qu'aujourd'hui, on dirait une psychose.
Voici donc un cas archétypal de récit de prodiges avec renseignements insuffisants. Tite Live n'en donne aucun, Denys d'Halicarnasse parle de voix et de spectacles. Même un ufologue aurait du mal à récupérer cette histoire, sauf en disant: "parmi tous ces prodiges, il y avait probablement quelques OVNIs". En même temps, on devine que Rome vécut cette année là une "vague" de prodiges, comme elle en avait connu en 490.

On peut en conclure que ces prétendus prodiges, étaient d'une grande banalité, genre pareidolie auditive, ou passage d'un vol de corbeaux, et que leur interprétation en termes de prodiges n'était du qu'à la psychose, à cause d'une "funeste disposition des esprits".
Mais cette funeste disposition fut exploitèe par les devins, qui, comme d'habitude, expliquèrent que les romains n'observaient pas assez les rites sacrés, autrement dit, ne faisaient pas assez appel à eux. Et cette exploitation couta la vie à une vestale, qui au lieu d'être renvoyée, fut froidement assasinée avec des raffinements de cruauté, après avoir été torturée. Après quel crime odieux, les devins affirmèrent que les dieux étaient contents. Les romains de l'époque, qui n'hésitaient pas à tuer les enfants jugés monstrueux, joignaient la stupidité à la barbarie. Une barbarie dont Tite Live et Denys d'Halicarnasse sont les précieux témoins, comme antidote aux manuels de notre enfance, qui font des romains de vertueux citoyens.

Dernière mise à jour: 26/09/2014

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