1943 Jules Duhem mélange tout


LE VOL MAGIQUE


Les plus redoutables magiciens volants sont ceux qui, maîtres de l'atmosphère, voyagent dans les nuées, montés sur des vaisseaux aériens, et vont jeter où il leur plaît la grêle, les orages, les plus effrayants météores. En Occident, la plus ancienne mention de ces semeurs de tempêtes se lit dans Dion Cassius (3), au sujet de l'éruption du Vésuve. Peu de croyances ont des racines plus profondes. On trouve celle-ci ramifiée en une foule de visions qui peuplent le ciel de flottes errantes et de réprouvés. Denys d'Halicarnasse, le poète Prudence, saint Grégoire, Sédécias, les Grandes Chroniques de France, attestent ces apparitions. Justice est faite des magiciens volants quand ils viennent à terre et qu'on peut les saisir. Contre eux se déchaînent les fureurs populaires. Vers la fin du règne de Charlemagne, plusieurs étrangers ayant été vus à Lyon sur la place au Change, le bruit courut qu'ils descendaient d'un vaisseau envoyé par Grimoald, duc de Bénévent, alors ennemi de la France, pour dévaster le pays. Une émeute éclate, et il faut tout l'ascendant de l'évêque Agobard, homme instruit et juste, pour les sauver (4). Mais nombre de prétendus magiciens aéronautes n'en sont pas moins saisis et immolés. Rien ne prévaut, en effet, sur la peur et l'illusion.

(3) Historiarum romanarum libri XXIII. L'éruption de l'an 79 est racontée dans la vie de Titus
(4) Agobardi. Liber contra insulsam vulgi opinionem de grandine et tonitruis in Agobardi Opera, Parisiis, F. Muguet. 1665-1666, 2 vol in -8°. Cap II


SOURCE: Jules Duhem,Histoire des idées aéronautiques avant Montgolfier, Sorlot, 1943, p. 47

Remarques:

L'auteur n'a visiblement pas lu le texte d'Agobard, puisqu'il mélange l'épisode des quatre étrangers avec l'épizootie bovine et le place sous Charlemagne.
Le fait qu'il situe les étrangers sur la place du change, et qu'il y mèle la fausse référence à Grimoald indique qu'une de ses sources est Delandine. Mais il cite correctement le titre de l'édition de Baluze, qu'il n'a cependant pas lu. Il s'est donc servi d'une source intermédiaure, basée sur Delandine, et mentionnant le titre de l'édition Baluze.
Par ailleurs, Dion Cassius ne parle absolument pas de semeurs de tempêtes: il écrit:
Des hommes nombreux et grands, d'une taille au-dessus de toute taille humaine, tels qu'on dépeint les géants, furent vus, de jour et de nuit, errants tantôt sur la montagne, tantôt aux environs et dans les villes, tantôt se promenant dans l'air. (Dion Cassius, Histoire romaine, Livre LXVI)

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