L'abbé Moreux |
Ou allons nous? |
On ne présente plus l'abbé Moreux aux astronomes amateurs vétérans, mais aujourd'hui beaucoup de gens le connaissent peu.
Théophile Moreux, né en 1867, d'un père instituteur, et d'une mère très croyante, étudia au lycée de Bourges, puis au petit séminaire Saint-Célestin, puis au Grand Séminaire de Bourges.
Nommé professeur de mathématiques en 1889, il fut ensuite ordonné prêtre à 24 ans et enseigna au petit séminaire comme professeur de sciences et de mathématiques.
Il devint, en 1892, secrétaire de Mgr Boyer, ce qui lui valut plus tard d'être chanoine honoraire de la cathédrale.
En 1893, il adhéra à la Société astronomique de France, et fonda, en 1899, son premier observatoire d'astronomie au petit séminaire Saint-Célestin. Suite à la séparation de l'église et de l'état, il en fut expulsé, mais put récupérer ses instruments.
En 1907, il construisit son propre observatoire au 22 de la rue Ranchot, où la maison existe encore (mais plus l'observatoire). Pour le payer, il fit de nombreuses conférences, et écrivit des dizaines de livres de vulgarisation, les plus connus étant sur l'astronomie.
Il participa à de nombreuses expéditions scientifiques, et dirigea les observations de l'éclipse totale de soleil à Sfax en 1905. Il fit aussi des notes à l'Académie des sciences pour présenter ses travaux à propos de Mars et du Soleil.
Le 1er février 1921, il fut nommé chevalier de la Légion d'honneur, au titre de l'Instruction Publique.
Arrêté par la gestapo en 1943, à cause de ses critiques anti-allemandes, il fut envoyé à Fresnes, puis à la prison de Bourges, dont par chance, le directeur était un ses lecteurs, qui le fit libérer.
Il mourut à Bourges, le 13 juillet 1954, et n'eut droit qu'à une nécrologie d'un quinzaine de lignes dans le bulletin de la société astronomique de France, mais à deux pages dans la revue Ciel et Terre.
Pour commenter la gravure d'Ambroise Paré, pensez vous qu'il évoquerait les peurs de nos ancêtres? Que nenni, c'est à nous qu'il va faire peur! Lisez plutôt:
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Reste à imaginer ce qui se passerait au cas où la Terre rencontrerait, non la queue impalpable d’une comète, mais son noyau lui-même.
Et notez que le fait est loin d’être irréalisable.
Il n’y a pas bien longtemps encore, l’illustre Laplace prétendait que les comètes parcourent dans tous les sens les espaces intersidéraux, et les poètes d’alors n’avaient pas manqué de saisir cette occasion pour chanter ces messagères rapides reliant entre eux les mondes de l’infini.
A cette question: « D’où viennent les comètes ? » l’Astronomie moderne répond en nous montrant que les comètes accompagnent le Système solaire dans son grand
voyage à travers les constellations. Notre Soleil, dit-elle, n’est qu’une étoile perdue au milieu de l’immensité; parmi ces millions d’astres brillant au-dessus de nos têtes, le centre de notre Système n’est qu’une étoile au milieu des étoiles.
Comme elles, il est animé d’une vitesse fantastique qu’on peut évaluer à environ 20 kilomètres par seconde. Humble soldat de l’armée céleste, il emporte avec lui les planètes, la Terre, leurs satellites, et ces astres plus petits comme masse, que nous appelons les comètes.
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Mais ces messagères vagabondes le suivent comme autant de papillons attirés vers son intense rayonnement. Restes de la grande nébuleuse qui a donné naissance aux planètes, les comètes, selon les lois de l’attraction agissant diversement sur chacune, se sont dispersées sur de longues ellipses. Quelques-unes d’entre elles tournent sur des orbites contenues dans les limites des planètes. D’autres, au contraire, ont été lancées vers des régions lointaines, si lointaines, que, à ces formidables distances, l’attraction solaire se fait à peine sentir.
Et l’on a pu calculer que ces comètes ne parcourent pas |
Comète de 1528
Fac-similé d'un dessin d'Ambroise Paré
(Extrait des Monstres célestes |
plus de quelques centimètres seulement par seconde.
N’importe! les lois inexorables qui régissent la matière les ramèneront tôt ou tard vers la grande source calorifique et lumineuse qui les tient rivées dans les limites de son immense domaine.
Ces théories nouvelles peuvent seules nous expliquer le nombre énorme de comètes sillonnant l’espace interplanétaire.
Des statistiques sagement interprétées, il faudrait en effet conclure que l’espace compris entre le Soleil et Neptune, la dernière planète connue du Système solaire, ne contiendrait pas moins de 200 millions de comètes périodiques.
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Partant de ces chiffres, il est facile de calculer le nombre de ces astres qui suivent dans sa marche notre Soleil, et qui ne sortent pas de sa sphère d’attraction
on arrive alors au chiffre 75, suivi de 15 zéros: 75 quatrillions de comètes, ou 75 millions de milliards d’astres chevelus! Encore n’est-ce là qu’une évaluation grossière basée sur des chiffres minima!
Voilà donc un premier fait établi la multitude des comètes voyageant dans l’espace.
Dès lors, on conçoit aisément que, à chaque instant de sa marche autour du Soleil, dans cette course vertigineuse qui nous fait parcourir 29 kilomètres par seconde, la Terre
puisse rencontrer une comète ou plutôt un noyau cométaire.
Supposons que pareil fait soit à la veille de se produire. Plusieurs jours à l’avance le phénomène serait annoncé par les astronomes; nous n’aurions plus alors
qu’une seule ressource: fuir aux antipodes, nous précipiter de toute la vitesse de nos automobiles, de nos steamers ou de nos aéroplanes sur l’hémisphère opposé à la rencontre.
Puisque, en effet, le noyau d’une comète suffirait à lui seul à détruire plusieurs villes comme Paris, que dire du choc effroyable causé par la rencontre d’une masse atteignant les dimensions de notre globe?
Quelques heures avant le cataclysme, l’humanité terrorisée assistera à des spectacles effrayants: fleuves et mers commenceront à sortir de leurs limites. Avec leurs vagues déchaînées, les Océans iront se tuer à l’assaut de la terre ferme....
En présence d’un pareil fléau, seules les populations réfugiées sur la cime des plus hautes montagnes auront la vision terrifiante des scènes précédant la fin du monde.
Sur une mer sans rivage planera un livide crépuscule. Le disque du Soleil, entrevu à travers l’atmosphère du noyau, présentera une teinte sinistre. Les premières particules cométaires s’enflammant au contact de notre atmosphère, donneront le tableau du plus merveilleux feu d’artifice que l’homme ait jamais contemplé.
Encore ces phénomènes ne seront-ils que les signes avant-coureurs d’un effroyable incendie.
Le moment où le gros de la comète entrera en contact avec la haute atmosphère sera le signal d’un ébranlement général. Huit secondes à peine s’écouleront depuis le commencement de ce formidable orage jusqu’au moment où, dans un choc terrible, les continents seront défoncés. La chute de tous ces matériaux en ignition au milieu de la tempête déchaînée sur l’Océan produira en une minute des trombes de vapeurs brûlantes qui détruiront les derniers organismes épargnés dans la catastrophe.
L’humanité, réfugiée sur l’autre côté de la Terre, pourra-t-elle se garantir du cataclysme? Nul ne peut l’affirmer.
Et quel astronome peut se porter garant que pareille rencontre ne se produira pas, dans quelques années peut-être?
C’est alors que l’humanité pensera à ces paroles terribles que rapporte l’Apôtre:
« En ce temps-là, Jésus dit à ses disciples : Quand vous verrez l’abomination de la désolation prédite par le prophète Daniel se répandre dans le lieu saint (que celui qui lit comprenne), alors que ceux qui seront dans la Judée s’enfuient dans les montagnes, que celui qui sera sur le toit ne descende pas pour emporter quelque chose de sa maison, et que celui qui sera dans les champs ne revienne pas prendre son vêtement. Priez pour que votre fuite n’arrive pas en hiver ou le jour du sabbat, car la tribulation sera alors si grande, que jamais, depuis le commencement du monde jusqu’à présent, il n’y en a eu de semblable et qu’il n’y en aura jamais...
Car l’avènement du Fils de l’homme sera comme l’éclair qui part de l’Orient et brille jusqu’à l’Occident. Partout où sera le corps, là s’assembleront les aigles. Mais aussitôt après ces jours de tribulation, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les vertus des cieux seront ébranlées.
En vérité, je vous le dis, cette génération ne finira pas que tout cela n’arrive. Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas.»
(Abbé Th. Moreux, Où allons nous?, Maison de la bonne presse, 1913, p.83-85)
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Houla, la! On part d'une étude sur les comètes, illustrée, assez conventionnellement, de la gravure d'Ambroise Paré, et on se retrouve avec une description de la fin du monde. Enfoncée l'épouvantable description d'Ambroise Paré. Minable! Ridicule! Dans l'art d'épouvanter la population, Ambroise Paré n'est qu'un enfant de choeur.
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