Pas de martien à Lavoux
Divers catalogues et ouvrages mentionnent le martien poilu de Lavoux, sans guère avoir consulté les journaux d'époques. De fait, si aucun martien poilu ne s'est manifesté à Lavoux, aucun journal n'a publié de rectificatif non plus.
Nous ne connaissons d'ailleurs pas le contenu de l'article original, apparemment publié à Poitiers le 11 octobre, nous n'avons que des articles de seconde main
Nous lisons, par exemple, dans le Nouveau Nord Maritime:
Un personnage a forte moustache
Poitiers. 11. - M. Roger Barrault, manœuvre à Lavoux (Vienne) a déclaré que, roulant à bicyclette, samedi, vers 19 heures, il avait été brusquement arrété par un double faisceau lumineux émanant d‘une sorte de « scaphandrier » haut à peine de 1m. 50 avec des bottes sans talon, les yeux très brillants et une forte moustache.
Le scaphandrier se promena environ une minute sur la route, affirme M. Barrault, puis disparut brusquement vers la forêt toute proche.
(Le Nouveau Nord Maritime, 12 octobre 1954, page 8)
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Jimmy Guieu embraye sur l'affaire après avoir décrit celle de Pournoy-la-chétive:
Un autre évènement, survenu trente minutes plus tard, près de Lavoux (Vienne) confirme en partie le témoignage des trois enfants quant à la description de l'Ouranien.
Note: En fait l'observation des enfants, à Pournoy-la-chétive, à eu lieu 23H 30 mn avant.
A 19 heures, M. Roger Barrault, manœuvre à Lavoux, roulait à bicyclette. Il fut brusquement arrêté par un double faisceau lumineux que projetait « une sorte de scaphandrier, haut de 1m. 50 maximum, avec des bottes, les yeux très brillants et... une forte moustache »! L’Ouranien se promena environ une minute sur la route, puis s’enfuit vers la forêt toute proche.
Les trois enfants, plus haut, affirmèrent que l’Ouranien avait le visage poilu. M. Barrault le décrit « avec une forte moustache » Nous conclurons qu’il s’agit sans doute d’un être de la même espèce au système pileux facial très fourni. Sa taille est à peu près la même. Pour les enfants, ses yeux sont « très gros » ; pour M. Barrault, « très brillants ». Nous penchons plus volontiers pour une description exacte donnée par les enfants car un détail nous frappe ; si pour ces derniers et pour M. Barrault l’Ouranien avait le visage « poilu », c’est très probablement parce qu’il ne portait pas de casque.
L’ouranien, se présentant ainsi le visage découvert, pouvait donc respirer notre atmosphère. Le premier arborait une longue tunique; le second une « combinaison de vol » sans casque. Cependant, tous deux étaient munis d’une « lampe » (selon l’appellation des enfants). Mais seul M. Barrault en aperçut le double faisceau lumineux.
( Jimmy Guieu, Black Out sur les Soucoupes Volantes, Fleuve Noir 1956, page 179)
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Aimé Michel insiste sur l'identité des êtres de Pournoy-la-chétive et de Lavoux.
Vers 19 heures, donc, ce soir-là, M. Roger Barrault, de Lavoux, roulait à bicyclette près du village, lorsque, dans le crépuscule tombant, il se trouva soudain nez à nez avec une sorte d’être indéfinissable logé dans un « scaphandre ». Il était haut d’environ un mètre cinquante, affirme M. Barrault, ses « jambes » n’avaient pas de talon, il disposait d’une « tête » ressemblant à une vaste touffe de poils avec des « yeux » brillants ; deux espèces de phares superposés verticalement, extrêmement lumineux, se remarquaient à mi-corps sur sa face avant. L’être se déplaça sur la route pendant une minute environ devant M. Barrault « paralysé » puis disparut entre les arbres de la forêt proche.
Cette description, faite par un homme d’esprit très simple (M. Barrault est manœuvre), obtint dans les journaux du surlendemain un vif succès d’hilarité (l). Le « Martien moustachu » prit place dans le folklore journalistique et dans la conversation des personnes sensées comme la dernière réincarnation de l’éternelle sottise humaine. Maintenant encore, il constitue un argument sans réplique dans toute discussion où quelque faible d’esprit se risque à prononcer les mots de Soucoupe Volante. Qu’aurait-on dit alors si l’on avait su qu’à l’autre bout de la France, une demi-heure avant M. Barrault, des enfants disaient avoir approché un être exactement identique
(1) Figaro di 11/10.
Note: La paralysie n'est pas mentionnée dans les premiers articles de presse, ni par Jimmy Guieu, mais apparait dans Samedi-Soir du 14 octobre. Quant à l'exacte identité des descriptions elle n'existe qua dans la tête d'Aimé Michel
( Aimé Michel, Mystérieux Objets Célestes, Arthaud 1958, page 262)
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Jacques Vallée retient la paralysie et ajoute une poitrine velue.
9 octobre 1954, 19 : 00. Lavoux, Vienne (France)
M. Barrault roulait à bicyclette quand i1 vit brusquement un étre habillé comme un scaphandrier qui dirigeait sur lui deux rayons lumineux. Il portait des bottes sans talon et ses yeux étaient trés brillants. Il marcha sur la route pendant une minute puis pénétra dans la forét. Le témoin fut « paralysé » pendant la durée de l’incident. L’étre avait une poitrine velue et il y avait deux lumiéres l’une au dessus de l’autre, devant lui (P. 45, P. 48, M. 153).
Note: Comment le témoin aurait il pu voir une poitrine velue si l'être portait une tenue de scaphandrier?
(Jacques Vallée , Un siècle d'atterrissage UFO, in Chronique des apparitions extraterrestres, Denoel 1972, page 296)
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Il faut attendre la publication de "Mystérieuses soucoupes volantes" pour apprendre que tout ça, c'était du vent:
Le 9 octobre 1954, à Lavoux (Vienne).
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M. Baillon, enquêteur, écrit:
J’ai pu retrouver le témoin qui n’habitait plus Lavoux mais une petite ferme isolée au sud de Chauvigny. Interrogé sur son observation de 1954, il m’a déclaré:
«Je passais dans les environs de Lavoux quand j'ai vu un jeune homme de 17 ans que j’ai parfaitement reconnu; il s’était déguisé à l'aide d'une tenue de parachutiste, d'un casque allemand « scié sur le coté », et d’une espéce de boite qui brillait.
Je l’ai poursuivi dans le bois mais je l’ai perdu de vue.
J’ai raconté cette histoire au bar et l’histoire largement déformée est arrivée a l'oreille d'un journaliste, d’ou l’article du Figaro.
De passage à Paris quelques jours plus tard, M. Barrault serait allé protester auprès du dit journal, et d’après ce qu'il nous a dit il a du se contenter de vagues excuses, mais aucun rectificatif n'a paru ».
Note: Donc pas de martien, pas d'yeux brillants, pas de moustache, pas de double faisceau lumineux, pas de paralysie, rien qu'une farce, mais pas de rectificatif non plus.
(Fernand Lagarde , Mystérieuses soucoupes volantes, Albatros 1974, page 143)
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Et dès l'année suivante, Jean Giraud répercute la démystification:
9/10/54 Lavoux (Vienne)
Vers 19h00, M. BARRAULT qui rentrait chez lui à bicyclette se trouva sou-
dain nez à nez avec un être de I,50m logé dans un scaphandre. Les jambes
de l'être n'avaient pas de talon et sa tête ressemblait à une touffe de
poils avec de grands yeux brillants. Il se déplaça sur la route devant le
témoin paralysé, puis disparut dans les bois (Centre Matin du 12/10/54).
...
SEULEMENT VOILA:
...
Une contre-enquête effectuée par L.D.L.N. montra que Mr. BARRAULT de
Lavoux avait simplement eu à faire à une farce organisée par un jeune de
18 ans qui s'était déguisé et qu'il avait parfaitement reconnu. Tout le
reste (paralysie et autre) n'étant qu'une invention de journaliste en mal
de copie.
Note: orthographe et typographie respectés.
(INFO OVNI n° 0, Avril 1975, septième et huitième page)
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En 1978, Alain Gamard n'est pas en reste.
10. : 9 octobre 1954, 19 h 00, Lavoux (Vienne).
L'anecdote: M. Roger Barrault rentre chez lui à bicyclette lorsqu'il se trouve nez à nez avec un être de 1,50m logé dans un scaphandre. Ses jambes n'ont pas de talon et sa tête ressemble à une vaste touffe de poils avec des yeux brillants. Il porte deux espèces de phares superposés à mi-corps, sur sa face avant. Il se déplace sur la route devant M. Barrault paralysé, puis disparaît dans la forêt.
Réf. : - Le Figaro du 11/10/54.
- Centre-Matin du 12/10/54.
- Guieu 11, p. 204.
- Michel 191.
- Carrouges 108.
Les faits : M. Baillon, enquêteur LDLN, a retrouvé le témoin. Ce dernier devait lui déclarer qu'il avait vu ce jour-là un jeune homme de 17 ans (qu'il avait parfaitement reconnu) déguisé à l'aide d'une tenue de parachutiste, d'un casque allemand « scié sur le côté » et d’une espèce de boîte qui brillait. M. Barrault poursuivit le plaisantin mais le perdit de vue. Il raconta son histoire au bar, et c'est une version largement déformée qui fut publiée dans les journaux.
Réf. : - M.S.V. 143.
Info-OVNI n° 0.
Note: cette date erronée du 7 octobre montre que la source est INFO OVNI n° 0.
(Alain Gamard, Méprises, canulars and Co", in, Eric Zurcher, Les apparitions d'humanoïdes, Alain Lefeuvre 1978, p 178)
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En 1979, Michel Figuet publie lui aussi la démystification à la fin de son volumineux ouvrage, avec Les OVNI démystifiés, mais il semble que tout le monde ne s'est pas donné la peine de lire ce chapitre.:
Une farce organisée par un jeune homme de dix-huit ans
09 10 1954 19 h Lavoux (Vienne).
TEMOIN. M. Barrault.
OBSERVATION. Un étre poilu portant deux lampes pectorales superposées, des bottes sans talon. Il était habillé comme un scaphandrier et ses yeux étaient brillants.
DEROULEMENT. M. Barrault, qui rentre chez lui à bicyclette, se trouve soudain nez à nez avec un étre de 1 m 50 logé dans un scaphandre. Il passe sur la route, devant 1e témoin qui est paralysé, et disparait dans les bois.
EN REALITE. Une contre-enquête effectuée par L.D.L.N. démontra que le témoin avait eu affaire à une farce organisée par un jeune homme de 18 ans qui s’était déguisé et qu’il avait parfaitement reconnu. Tout 1e reste n’était qu’invention d’un journaliste en mal de copie.
SOURCES. Catalogue Vallée, cas n° 221. - Jimmy Guieu : Black-out sur les S. V., p. 204. - Info-OVNI, n° 0, « Le lapin et le renard » par le groupe 03100. - Le Figaro du 11/10/1954. - Paris-Presse du 12/10/1954.- Aimé Michel : A propos des S. V. p. 191-192.
(Michel Figuet,OVNI: Le premier dossier complet des rencontres rapprochées en France., Alain Lefeuvre 1979, p 666-667)
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La démystification du cas de Lavoux étant déjà assez connue, l'affaire n'a pas été enquêtée par Barthel et Brucker, et par conséquent, pas réhabilitée par Jean Sider.
De même, Julien Gonzalez admet la démystification connue depuis 40 ans.
Lavoux, Vienne, 09 octobre 1954, 19h00.
L’anecdote: M. Roger Barrault rentre chez lui à bicyclette lorsqu’il se trouve nez à nez avec un être de 1,50 m logé dans un scaphandre. Ses jambes n’ont pas de talon et sa tête ressemble à une vaste touffe de poils avec des yeux brillants. Il porte deux espèces de phares superposés à mi-corps, sur sa face avant. Il se déplace sur la route devant M. Barrault paralysé, puis disparaît dans la forêt.
Sources: Jimmy Guieu, Black-Out sur les Soucoupes Volantes, page; Aimé Michel, Mystérieux Objets Celestes, page; Michel Carrouges, Les apparitions de Martiens, page 108.
Note: Pour Black-out, c'est la page 179, pour M.O.C, c'est la page 262.
La réalité: M. Baillon, enquêteur du groupement LDLN, a retrouvé le témoin. Ce dernier devait lui déclarer qu‘il avait vu ce jour-là un jeune homme de 17 ans (qu’il avait parfaitement reconnu) déguisé à l’aide d’une tenue de parachutiste, d’un casque allemand « scié sur le côté » et d’une espèce de boîte qui brillait. M. Barrault poursuivit le plaisantin mais le perdit de vue. Il raconta son histoire au bar, et c’est une version largement déformée qui fut publiée dans les journaux.
Source: Mystérieuses Soucoupes Volantes, par le groupement LDLN, page l43.
(Julien Gonzalez, RR3 - Le Dossier des Rencontres du Troisième Type en France, Le Temps Présent, 2014, pp 435)
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Ainsi, à Lavoux, il n'y a jamais eu de martien moustachu aux yeux très brillants, ni de paralysie, et pourtant nombre d'ufologues ignorent la démystification de M. Baillon, revélée par Fernand Lagarde, et relayée ensuite par plusieurs ufologues, puisque Patrick Gross recense plus d'une dizaines de sources continuant de citer la légende, après sa réfutation.
De toutes façons même en ignorant les démystifications des cas de Pournoy-la-chétive et de Lavoux, il n'était pas possible de conclure, comme Aimé Michel, à l'identité exacte des êtres prétendument observés. D'un coté un être de 1.20 m, en soutane, avec une lampe, de l'autre un être de 1.50 m en tenue de scaphandrier. On voit que si, au départ, les journalistes ont largement déformé les faits, les ufologues ne sont pas en reste en ignorant les différences, et en rajoutant poitrine velue et paralysie.
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