Le canular du cerf-volant
L'abbé de la Neufville se raccrochait, comme à une bouée de sauvetage, à son hypothèse d'un cerf-volant géant, pour exppliquer l'observation de la croix de Migné. Pour se défendre, il faisait remarquer qu'il n'en était pas l'auteur.
Je vous ferai encore observer, Monsieur , que ce cerf-volant n’est pas de mon invention; il en a été parlé dans les journaux , peu de temps après l’événement de Migné. M. l'abbé Marsault en a aussi parlé dans sa lettre à M. le secrétaire, datée de Poitiers le 3 avril 1827. Récits , etc. , pag. 26. Cette lettre a été écrite environ cinq mois avant la publication de mon petit ouvrage : Le faux Miracle.
M. l'abbé de la Neufville, Nouvelles preuves contre le faux miracles de Migné, Delaunay, 1829, page 121
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On note que l'abbé de la Neuville cite, en abrégeant le titre, Récits, rapports et correspondance au sujet de l'apparition de la croix de Migné. Que ne l'avait il mieux lu! On trouve à la page 30:
Il y a des gens qui ont osé compter assez sur la sottise publique pour raconter sérieusement dans un journal, qui-se dit chrétien, et qui n’est qu’impie et révolutionnaire (1), que l'apparition étoit due à un cerf-volant.
(1) La France Chrétienne |
Notons l'ignorance et le sectarisme du rédacteur, qui qualifie La France Chrétienne de journal impie et révolutionnaire, alors qu'en réalité, c'était un journal catholique et anti-révolutionnaire. Mais suivons la piste: Effectivement, dans le numéro du 11 mars 1827, nous trouvons ceci, que l'abbé de la Neuville n'a manifestement pas lu:
Nous ne pouvons malheureusement pas consulter le journal Le Dragon, mais il est clair que l'histoire, supposée racontée par un professeur Parisien, qui la tenait d'un de ses élèves, qui avait reçu une lettre d'un camarade de Poitiers, n'est qu'un canular. La lettre dit qu'un vent frais s'élevait de l'occident, alors que ce soir là régnait un calme plat. Elle dit aussi qu'on entendait les chants de la mission, alors que seul le prédicateur parlait. Manifestement, l'auteur a concocté une histoire propre à rendre compte de qu'il croyait connaitre de l'apparition.
Ce canular fut d'ailleurs éventé à l'époque:
ils supposèrent une lettre écrite par un élève du collége de Poitiers à un de ses amis à Paris, par laquelle il se reconnaissait l'auteur du cerf-volant pris à Migné pour une croix. Cette lettre fut insérée dans un journal de la Belgique, appelé le Dragon. Un habitant de ce pays, qui avait ouï parlér
de ce miracle, étonné de le voir démenti et tenant à connaître la vérité, écrivit à M. l'aumônier du collège de Poitiers, qui fit part de la lettre à M. le proviseur.
Celui-ci fit faire des recherches, et l’on découvrit parmi les élèves externes un jeune homme qui portait le nom cité dans la lettre. On le lui amena : l'ayant questionné sur le fait, il leur répondit qu'il n'avait aucune connaissance à Paris ; qu'il n’était pas l'auteur de cette lettre , et qu'il était tout à fait étranger à la fable du cerf-volant, et à tout ce qui avait rapport à
ce conte.
Vrindts, La croix de Migné vengée de l'incrédulité et de l'apathie du siècle, Librairie ecclésiastique de Rusand, 1829, page 286
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