648 avant JC
Mer Egée, éclipse d'Archiloque
En réalité: éclipse utilisée par Archiloque comme procédé littéraire.

Archiloque (ou Archilochus), fut un poête grec réputé. On le crédite d'avoit inventé l'Iambe. Dans l'antiquité, certains le comparaient à Homère. Il ne nous reste que des fragments de ses oeuvres, dont l'un nous intéresse particulièrement, car il fait manifestement allusion à une éclipse de soleil.

7ème siècle avant notre ère, Archiloque mentionne une éclipse.

(François Lasserre, Le fragment 74 d'Archiloque, Museum Helveticum, 1947, vol 4, fasc 1, p 1)

II n'y a rien à quoi il ne faille s'attendre, rien dont on puisse jurer que cela n'arrivera jamais, rien dont on doive s'étonner, puisque Zeus, le père des Olympiens, a fait la nuit au milieu du jour en voilant la lumière étincelante du soleil (spectacle qui a répandu l'épouvante parmi les hommes) !
Oui, désormais on peut tout croire, on peut s'attendre à tout : qu'aucun de vous ne s'étonne, quand même il verrait les bètes fauves, changeant leurs retraites pour le séjour humide des dauphins, préférer au continent les flots retentissants de la mer et les dauphins se plaire dans les montagnes.

(Amédée Hauvette, Archiloque sa vie et ses poésies, Albert Fontemoing, 1905, p 73)
Note: Il est clair qu'il ne peut s'agir que d'une éclipse de soleil, tant d'après la description, que d'après l'épouvante qu'il a inspiré. Par contre rien ne prouve, ni même n'indique qu'Archiloque a observé cette éclipse lui même. On sait seulement qu'il en a eu connaissance.

vers 329 à 323, Aristote mentionne ce passage comme un procédé littéraire.


Aristote
La Rhétorique d'Aristote, traite de l’art oratoire, c'est-à-dire de "l'apprentissage de la capacité de discerner dans chaque cas ce qui est potentiellement persuasif" (un art ou excellait les sophistes). le premier livre traite de la définition et du fonctionnement de la rhétorique, le second de la psychologie des locuteurs, et le troisième des effets de style. C'est dans ce dernier livre qu'Aristote parle du passage d'Archiloque comme d'un procédé littéraire.
XVI. Quant aux moeurs, comme le fait de donner quelques détails sur sa propre personne nous expose l'envie, à l'accusation de prolixité ou à la contradiction, et celui de parler d'un autre au reproche d'ouvrage ou de grossièreté, il faut faire parler une autre personne, comme Isocrate le fait dans le Philippe et dans l'Antidosis. De même Archiloque, pour blâmer. Il met en scène un père qui parle ainsi au sujet de sa fille, dans cet ïambe :
Avec de l'argent, il ne faut désespérer de rien, ni affirmer par serment l'impossibilité de quoi que ce soit.
Il met en scène l'architecte Charon, dans l'ïambe qui commence ainsi :
Peu m'importent les richesses de Gygès...
De même Sophocle fait parler Hémon à son père en faveur d'Antigone, comme si d'autres personnes tenaient la parole.

Note: Aristote, qui écrivait trois siècles et demi après Archiloque, a probablement lu le livre entier d'Archiloque, et non le seul fragment qui nous en reste. Son avis nous est donc précieux, et nous comprenons maintenant qu'il s'agissait bien, pour Archiloque, de donner un exemple d'impossibilité apparente et réalisée, en faisant parler une personne ayant plus d'autorité que lui.
(Aristote, La Rhétorique, livre III, ch. XVII)

1882, Theodor Ritter von Oppolzer croit retrouver l'éclipse.


Th. R. von Oppolzer
Theodor Ritter von Oppolzer, astronome autrichien, est surtout connu pour son Canon der Finsternisse (canon des éclipses), donnant la liste des éclipses de soleil en remontant jusqu'à 1208 av. J.C., mais il a publié sur bien d'autres sujets. Pour en rester à celui des éclipses, il a publié en 1182, une étude de quatre pages sur l'éclipse décrite par Archiloque.
(von Oppolzer, Theodor Ritter, “Note über eine von Archilochos erwähnte Sonnenfinsterniss”, Sitzungsberichte der Mathematisch-Naturwissenschaftliche Classe der Kaiserlichen Akademie der Wissenschaften zu Wien, 86 (1882), II. Abtheilung, 790-793.)
cette étude n'étant pas accessible en ligne, nous devons nous contenter de son résumé par Günther.
Fragment 74 in Bergk’s Ausgabe des Archilochos enthält die offenbar auf Autopsie beruhende Beschreibung einer Sonnenfinsternis. Gestützt auf seine bekannten Syzygientafeln untersuchte nun der Verfasser alle Phänomene dieser Art, welche in die ungefähre Lebenszeit des Dichters (700-640 v. Chr.) fallen, und fand, dass eine am 6. April 647 stattgehabte Finsternis in der Tat ganz gut den Angaben des Bruchstückes entspricht. Thasos, wo sich Archilochos in seinen letzten Lebensjahren aufhielt, gehörte der Zone an, innerhalb welcher die Verfinsterung total gesehen wurde. Allerdings aber begann dieselbe schon am Vormittag, während aus den Dichterworten geschlossen werden kann ? nicht muss ?, der Beginn sei auf eine Nachmittagstunde gefallen.

Trajet des éclipses de l'époque
Le fragment 74 dans l'édition de Bergk d'Archiloque contient manifestement une description basée sur l'observation d'une éclipse solaire. Sur la base de ses tableaux de Syzygie connus l'auteur a maintenant examiné tous les phénomènes de ce genre, qui survinrent dans la durée de vie approximative du poète (700-640 av. J.C.) , et a constaté que l'une des précédentes éclipses, le 6 Avril 647 correspondait tout à fait au fragment mentionné. Thasos où Archiloque séjourna dans ses dernières années, appartenait la région à l'intérieur de laquelle l'éclipse était totale. Mais cependant,celle ci a commencé dans la matinée, alors que l'on peut conclure à partir des mots de poète? ou ne pas ?, que le début commença à une heure de l'après-midi.
Note: En fait le poète ne dit rien de précis sur l'heure, mais la carte du Canon der Finsternisse montre que l'éclipse de -656 correspondrait mieux que celle de -647. Ceci fera l'objet d'une étude de Millosevich.

mars 1893, Ilija Millosevich corrige l'erreur de la carte d'Oppolzer.


Ilija Millosevich
Ilija MiloŠevic, plus connu sous le nom de Millosevich fut un astronome italien assez prolixe, puisqu'une bibliographie de Jelena Antovich, contient pas moins de 449 entrées
L’illustre storico Beloch e lo studente di lettere di questa Regia Università Arnaldo Monti per i scopi diversi, ma simultaneamente, ebbero interesse di occuparsi dell’eclisse di Archiloco. E però dietro consiglio del primo e preghiera del secondo consacrai qualche ora alla ricerca, di cui rendo conto in questa Nota.
Del medesimo argomento si è occupato lo stesso Oppolzer, ed i suoi risultati si leggono in una « Note über eine von Archilochos erwähnte Sonnenfinsterniss, Sitzungsberichte der k. Academie der Wissenschaften in Vien, 19. Oct. 1882 »
Il risultato, a cui pervenne l’illustre scienziato, è il seguente:
L’eclisse di Archiloco (in hohem Grade wahrscheinlich) essere quello del 6 aprile 648 A. C..

L'éminent historien Beloch et l'étudiant de lettres de cette Université Royale Arnaldo Monti, dans des buts différents, mais en même temps, avait des intérêts pour s'occuper de l'éclipse d'Archiloque. Et donc sur les conseils du premier et à la prière du second, je consacrai quelques heures à la recherche, dont je rends compte dans cette Note.
Le même sujet a été traité par Oppolzer lui même, et ses résultats sont lus dans une « Note über eine von Archilochos erwähnte Sonnenfinsterniss, Sitzungsberichte der k. Academie der Wissenschaften in Vien, 19. Oct. 1882 ».
Le résultat, à laquelle arrive l'éminent scientifique, est le suivant:
L'éclipse d'Archiloque (in hohem Grade wahrscheinlich) est celle du 6 Avril 648 av. J.C.

Prendendo l’iconografia al canone di Oppolzer, l’unico eclisse che soddisfa a meraviglia a tutte le condizioni domandate è quello del 657 IV 15 A. C. Per chi esamina la curva trova che la centralità attraversa le Cicladi, taglia tutto l’Egeo da SW a NE e le ore del fenomeno sono fra 9h 40mn e 10h 0mn antim., cioè col sole ben alto da poter dire intorno a mezzodì.
En prenant l'iconographie du canon d'Oppolzer, la seule éclipse qui correspond à merveille avec toutes les conditions demandées est celle du 15 IV 657 av. J.C. Pour qui examine la courbe trouve que la centralité traverse les Cyclades, coupe à travers la mer Egée du SO au NE, et les heures de ce phénomène sont entre 9h 40mn et 10h 0mn du matin, ce qui, avec le soleil bien haut, peut se dire aux alentours de midi.
Note: voir plus haut la carte d'Oppolzer.

trajet de l'éclipse de 657 av. J.C.
  Di fronte a ciò solo il calcolo diretto poteva decidere la questione.
  A Paros intanto l’eclisse del 657 IV 15 A. C. mi risultò parziale, la massima fase a 9h. 44mn t. v. mattina per pollici 10,8; ad Atene per pollici 10,2; a Rodi per pollici 11,7; dacchè risultava evidente che la linea della centralità era iconograficamente erronea; difatti, calcolandola direttamente, essa passa a destra di Rodi e taglia l’Asia Minore, lasciando libero tutto l’Egeo. E però l’eclisse del -656 IV 15 (657 A. C.) dovevasi repellere come eclisse di Archiloco.

  Face à cela, seul le calcul direct pourrait trancher la question.
  A Paros à ce moment l'éclipse du 15 IV 657 av. J.C. m'apparut partielle; la phase maximale à 9h. 44 mn du matin, temps local, pour 10,8 doigts; à Athènes pour 10,2 doigts; à Rhodes pour 11,7 doigts; puisqu'il était évident que l'iconographie de la ligne de centralité était erronée; En fait, en calculant directement, elle passe à la droite de Rhodes et coupe l'Asie Mineure, en laissant toute la mer Egée. C'est pourquoi l'éclipse du 15 IV -656 (av. J.C.) devrait être rejetée comme éclipse d'Archiloque.

Note: la carte ci contre montre le trajet de cette éclipse.
Restava da rifare il calcolo per l’eclisse del 648 A. C. IV 6.
  Siccome Archiloco dimorò lungamente a Taso, che colonizz'o, calcolai soltanto l’eclisse per quella località.
  L’eclisse fu proprio totale a Taso, come Oppolzer aveva calcolato.
  La massima fase occorse a 9h 52mn 44s am. t. v. di Taso e fu di pollici 12,324. In questo caso l’errore iconografico è di ben 5°.
  La linea della centralità taglia l’alto Egeo e attraversa da SW a NE il Mar Nero uscendo in esso dalla bassa Romelia.
  L’eclisse adunque di Archiloco, totale a Taso verso le 10h am., è proprio quello del 6 aprile 648 A. C.

Il restait à refaire le calcul pour l'éclipse du 6 IV 648 av. J.C.
  Etant donné qu'Archiloque a vécu longtemps à Thasos, qu'il a colonisé, il ne faut calculer l'éclipse que pour cet emplacement..
  L'éclipse fut totale à Thasos, comme Oppolzer avait calculé.
  La phase maximale survint à 9h. 52mn 44s temps local de Thasos et elle était de 12.324 doigts. Dans ce cas, l'erreur iconographique est inférieure à 5 °.
  La ligne de centralité coupe le haut de l'Egée et traverse du S-O au N-E la Mer Noire en y entrant depuis la Thrace.
  Ainsi l'éclipse d'Archilochus, totale à Thasos vers 10h. du matin, est précisément celle du 6 Avril 648 av. J.C.

Note: A part l'hypothèse alternative de Stockwell, qui n'aura pas de suite, ce calcul d'Oppolzer, vérifié par Millosevich va faire foi, malgré les doutes d'Amédée Hauvette, jusqu'à Robert R. Newton.
(E.Millosevich, Sull'eclisse di Archiloco, Memorie della Societa degli Spettroscopisti ltaliani, vol. 22, 1894, p. 70)

juin 1893, William Thynne Lynn expose les travaux d'Oppolzer à travers Millosevich.

William Thynne Lynn, assitant à l'observatoire de Greenwich, fit de nombreuses communications, signées W.T. Lynn, dans des revues scientifiques. Ici, il signale dans une revue anglo-saxonne le travail de Millosevich, pour ceux qui ne lisent pas les revues italiennes.

The eclipse of Archilochus

  As some of your readers may not have access to the 'Memorie della Societa degli Spettroscopisti ltaliani,’ a brief account of Prof. Millosevich’s paper on the above subject in the April number may be of interest.
  A well-known fragment of Archilochus speaks of the Sun’s light at midday being turned into darkness. Although it was natural to suppose that this was due to a total eclipse, the late Dr. von Oppolzer was the first, so far as I am aware, to connect it with any calculated one. In the ‘ Sitzungsberichte ’ of the Vienna Imperial Academy of Sciences, he suggested the eclipse of April 6, B.C. 648, as in all probability that which was referred to by the poet, who remarks that the phenomenon was so strange that no one ought to be surprised at anything afterwards, not even if the wild beasts and dolphins should exchange their habits.
  The acceptance of this date for the eclipse referred to would make it necessary to bring the epoch at which the satiric iambist' of Paros flourished about half a century later than has generally been supposed. But Prof. Millosevich remarks that he was assured by his countryman, the illustrious historian Beloch, that we need not demur to this, the Greek chronology of the period being very uncertain. The eclipse-charts in Oppolzer’s ‘ Canon der Finsternisse ’ seemed, however, to throw the path of. the Moon’s shadow beyond the locality where Archilochus resided at the time, whether it were at Paros or Thasos. He has therefore repeated the calculation and examined all the solar eclipses during the seventh century before Christ. Of these only two merited particular attention, which occurred on April 15, B.C. 657, and on April 6, B.C. 648, respectively. But the former was not quite total, though 10°8 digits were eclipsed at Paros, 10'2 at Athens, and 11.7 at Rhodes. On the other hand, the eclipse of April 6, B.C. 648, was total at Thasos (the barren island which Archilochus compares to the backbone of an ass covered with rough wood) about 10 o’clock in the morning, an hour to which the expression μεςημβρια might fairly be applied. Prof. Millosevich thinks therefore that that eclipse may with some confidence be taken to be the one described by the poet.

L'éclipse d'Archiloque

  Comme certains de vos lecteurs peuvent ne pas avoir accès à la "Memorie della Societa degli Spettroscopisti ltaliani", un bref compte rendu de l'article du Prof. Millosevich sur le sujet ci-dessus dans le numéro d'Avril peut être intéressant.
Un fragment bien connu d'Archiloque parle de la lumière du soleil à midi changée en obscurité. Bien qu'il était naturel de supposer que cela était dû à une éclipse totale, le regretté Dr von Oppolzer a été le premier, autant que je sache, pour la connecter à une calculée. Dans le "Sitzungsberichte" de l'Académie impériale des sciences de Vienne, il a suggéré l'éclipse du 6 Avril 648 av. J.C., comme celle qui, selon toute probabilité, a été évoqué par le poète, qui remarque que le phénomène était si étrange que personne ne devrait être surpris par quoi que ce soit par la suite, même si les bêtes sauvages et les dauphins devraient échanger leurs habitudes.
L'acceptation de cette date pour l'éclipse mentionné rendrait nécessaire de mettre l'époque, à laquelle le poête satirique de Paros a prospéré, environ un demi-siècle plus tard que ce qui a été généralement supposé. Mais le Professeur Millosevich remarque qu'il a été assurée par son compatriote, l'illustre historien Beloch, que nous ne devons pas hésiter à cela, la chronologie grecque de la période étant très incertaine. La carte des éclipses dans le "Canon der Finsternis" d'Oppolzer semble, cependant, placer le chemin de l'ombre de la Lune au-delà de la localité où Archilochus résidait à l'époque, qu'elle fut à Paros ou à Thasos. Il a donc répété le calcul et examiné tous les éclipses solaires du septième siècle avant Jésus-Christ. Parmi celles-ci seulement deux méritaient une attention particulière, qui eurent lieu le 15 Avril 657 av.J.C. et le 6 Avril 648 av.J.C. respectivement. Mais la plus ancienne n' était pas tout à fait totale, bien que 10.8 doigts aient été éclipsés à Paros, 10.2 à Athènes, et 11.7 à Rhodes. D'autre part, l'éclipse du 6 Avril 648 av.J.C. était totale à Thasos (l'île stérile qu'Archiloque compare à l'épine dorsale d'un âne couvert de bois rugueux) à environ 10 heures du matin, une heure à laquelle l'expression μεςημβρια pourrait équitablement être appliqué. Le Professeur Millosevich pense donc que cette éclipse peut être considérée avec une certaine confiance comme celle qui est décrite par le poète.

Note: C'est grace à Lynn que nous savons qu'Oppolzer aurait été le premier à faire le calcul de cette éclipse.
(W.T.Lynn, The eclipse of Archilochus, The Observatory juillet 1893, p. 269)

juillet 1893, John Nelson Stockwell préfère l'éclipse de 688 av. J.C..


trajet de l'éclipse de 689 av. J.C.

aspect du soleil éclipsé

aspect du ciel
John Nelson Stockwell, s'interessa à l'astronomie à l'age de 18 ans, et en fit pendant près de 70 ans! Comme Flammarion, il commença sa carrière comme calculateur d'éphémérides, et étendit bientôt ses sujets d'intérèt aux calculs d'éclipses. Ici, après avoir lu l'article de Lynn, il propose sa propre éclipse, mais nous allons voir ici qu'il négligeait un élément important du problème.
According to my computations the eclipse of Archilochus took place in the year B.C. 689, January 11, at which time there was an annular eclipse in which the centre of the annulus passed very near to the island of Paros, and at 10h 30m in the morning the eclipse was annular throughout that island. On account of the low altitude of the Sun the annulus was very broad, covering more than five and a half degrees of latitude ; so that the island of Thasos was only a very short distance outside of the path of annular eclipse. But Archilochus was very probably living at Paros, since Herodotus speaks of him as being a Parian. Moreover, historians, by means of existing records and traditions, have ascertained that he lived between the years B.C. 730 and B.C. 670; so that the eclipse took place when he was in the full vigour of manhood.
  As that was the only large eclipse of the Sun that was visible in that part of the world between the years B.C. 763 and B.C. 661, it would seem that there would be no question as to its identity. Although not quite total its magnitude amounted to 11.65 digits at all places within the limits of the annulus. The darkness must therefore have been sufficient to justify the description given by the poet.


Selon mes calculs l'éclipse d'Archiloque a eu lieu l'an 689 av. J.C. le 11 Janvier, auquel moment il y eut une éclipse annulaire dans laquelle le centre de l'anneau est passé très près de l'île de Paros, et à 10h 30m le matin l'éclipse était annulaire sur toute cette île. En raison de la faible distance du Soleil l'anneau était très large, couvrant plus de cing degrés et demi de latitude; de telle sorte que l'île de Thasos était seulement à une très courte distance en dehors de la trajectoire de l'éclipse annulaire. Mais Archiloque vivait très probablement à Paros, puisqu'Hérodote parle de lui comme étant de Paros. En outre, les historiens, au moyen de documents et traditions existantes, ont constaté qu'il a vécu entre les années av 730 av. J.C. et 670 av. J.C.; de telle sorte que l'éclipse a eu lieu quand il était dans la force de l'âge.
  Comme ce fut la seule grande éclipse du Soleil qui fut visible dans cette partie du monde entre les années 763 av. J.C. et 661 av. J.C., il semblerait qu'il n'y aurait aucun doute quant à son identité. Bien que pas tout à fait totale sa magnitude s'élevait 11,65 doigts dans tous les lieux dans les limites de l'espace annulaire. L'obscurité doit donc avoir suffi pour justifier la description donnée par le poète.

Note: Stockwell est encore timide dans son calcul de l'extension de la bande de visibilité de l'éclipse annulaire: elle couvrait toute la Grèce et la mer Egée, et était donc bien visible à Thasos. Inutile dans ce cas de se demander où était Archiloque. Par contre, comme l'auteur l'admet lui même, elle était largement annulaire, en sorte que, comme le montre notre shéma, le soleil ne fut obscurci qu'à 86%. C'est très insuffisant pour faire tomber la nuit, comme le montre l'aspect du ciel reconstitué par Stellarium. Mais le poête dit bien: a fait la nuit au milieu du jour en voilant la lumière étincelante du soleil (spectacle qui a répandu l'épouvante parmi les hommes). Or on n'imagine pas les hommes s'épouvanter sans que le nuit ne tombe complètement. Il s'agissait donc bien d'une éclipse totale, et l'hypothèse du docteur Stockwell ne tient pas debout.
(John N. Stockwell, The eclipse of Archilochus, The Observatory septembre 1893, p. 323)

1895. Camille Flammarion résume le travail de Millosevich.

Les éclipses anciennes. - M. Millosevich, l’astronome romain bien connu, vient de faire le calcul de l’ancienne éclipse totale de soleil citée dans l‘histoire sous le nom d'éclipse d’Archiloque, et a trouvé que cette éclipse arriva le 6 avril de l‘an 648 avant Jésus-Christ. Il y avait doute entre celle du 15 avril de l‘an 657 et celle du 6 avril 648. Le calcul établit que c’est bien celle-ci qui fut observée à Paros et fut totale à Tarse, où habitait Archiloque, qui avait dû fuir Paros à cause des ennemis qu’il s’y était faits par ses mordantes satires. La totalité arriva à 9h 52mn 44s. La ligne de centralité traversa la mer Egée et la mer Noire. (Memorie della Societa degli spettroscopisti italiani.)
(Camille Flammarion, Nouvelles de la science - Variétes, Bulletin de la Société Astronomique de France, janvier 1895, p. 31)

1899, Friedrich Karl Ginzel présente une meilleure carte que celle d'Oppolzer.

L'astronome Autrichien Friedrich Karl Ginzel a beaucoup travaillé sur les observations astronomiques anciennes, et on lui doit un monumental manuel des mathématiques et techniques de la chronologie, qui servit longtemps de référence. Un cratère lunaire porte son nom. En 1899, il a publié un Canon spécial des éclipses solaires et lunaires, ou il consacre deux pages à l'éclipse d'Archiloque.

  1° Totalle Sonnenfinsternisse 648 v. Chr. April 6 (Datum nach Oppolzer-Schwarz)
  1° Eclipse totale de Soleil 6 avril 648 av. J.C. (Données d'après Oppolzer-Schwarz)
  Archilocos frg. 74 (Bergk):
Auf alles muss man gefasst sein und nichts darf man verschwören
Auch über nichts sich wundern, seitdem Zeus der Vater der Olympier
Aus Mittag Nacht schuf, verbergend das Licht
der leuchtenden Sonne; klägliche Furcht aber befiel die Menschen.
On doit s'attendre à tout et on ne doit jurer de rien.
Et aussi ne plus s'étonner de quoi que ce soit, depuis que Zeus le père des Olympiens
a fait la nuit au milieu du jour, cachant la lumière
du brillant soleil, mais une crainte lugubre saisit les hommes.



Carte III: les éclipse du 7e siècle av. J.C.
L'auteur discute ensuite de la chronologie d'Archiloque, puis passe à l'étude des éclipses qui pourraient convenir.

Spezieller kanon: Wie aus der Karte III ersichtlich, können als sehr bedeutende Finsternisse für Griechenland und den Archipelagus nur folgende in Betracht kommen:
79]  689 v. Chr. Januar11 (ringf.) a)
85]  662 " "12 " b)
86]  661 " Juni27 " c)
88]  657 " April15(total) d)
92]  648 " "6 " d)
  Die Finsternisse b) rückt östliche als bei Schwarz und wird weniger wahrscheinlich, c) verschiebt sich etwas nördlicher als bei Schwarz und erreicht ihre Maxima.
für Parosfür Thasos
10",81 um 15h 2m,9 w. Zt.  11",51 um 14h55m,4
d) wird noch kleiner für Paros und Thasos als bei Schwartz (bei diesem für Paros 10",8, für Thasos 10",0)
e) verschiebt sich südlicher und wird bedeutender; Maxima
für Parosfür Thasos
11",72 um 9h 37m,2 w. Zt.  12",09 um 9h40m,0
und es gewinnt demnach, da sie auch der Tageszeit nach mit den Worten des Archilochos ungefähr übereinstimmmt die Oppolzer-Schwarz’sche Ansicht, dass diese Finsternis die gesuchte sei, noch weiter an Wahrscheinlichkeit, denn μεςημβριη ist hier nicht einseitig als die Zeit des Mittags, sondern im weiteren Sinne, den Gegensatz zwischen Nacht und hellen Tag ausdrückend, zu verstehen.


canon spécial: comme on le voit dans la carte III , ne peuvent être prises en considération que les éclipses très importantes pour la Gèce et l'archipel:
79]  689 av. J.C.Janvier11 (annulaire) a)
85]  662 " "12 " b)
86]  661 " Juin27 " c)
88]  657 " Avril15(totale) d)
92]  648 " "6 " d)
  L'éclipse b) se retire vers l'est d'après Schwarz et est moins probable, c) se décale un peu plus au nord d'après Schwarz et atteint son maximum.
à Parosà Thasos
10.81" à 15H 2.9mn   11.5" à 14H 55.4mn
d) est encore plus faible pour Paros et Thasos selon Schwartz (d'après lui 10.8" à Paros, 10.0" à Thasos)
e) se décale vers le sud et est significative; Maximum
à Parosà Thasos
11.72" à 9H 37.2mn   12.09" à 9H 40.0mn
et cela l'emporte en conséquence, car c'est aussi le moment de la journée ou l'opinion d'Oppolzer-Schwartz correspond approximativement aux mots d'Archiloque, pour que cette éclipse soit celle recherchée, avec encore plus de probabilité, car μεςημβριη n'est pas ici l'heure de midi, mais dans le sens plus large, l'expression de comprendre le contraste entre la nuit et le jour lumineux.

Note: Les notations de Ginzel prètent à confusion. le symbole " ne représente pas ici une seconde d'arc, mais un "doigt", unité employée depuis l'antiquité pour représenter la mgnitude des éclipses. 1 doigt représente 1/12 du diamètre lunaire. Ceci vient peut ètre que subjectivement, le diamètre de la lune est estimé à celui d'une assiette, qui fait la largeur de 12 doigts.
Pour ce qui est de l'éclipse, Ginzel se donne du mal à faire le tri dans les éclipses possibles, mais pas plus que ses prédécesseurs, il n'imagine qu'Archiloque puisse ne pas avoir vu l'éclipse lui même.

(F. K. Ginzel, Spezieller Kanon der Sonnen- und Mondfinsternisse, Berlin, 1899, p 167)

1905, Amédée Hauvette essaye de dater Archiloque et récuse l'utilisation de l'éclipse.

Amédée Hauvette, professeur de poésie grecque à la faculté des lettres de Paris, nous a laissé une monographie sur Archiloque, où il consacre quelques dizaines de pages aux problèmes de la chronologie d'Archiloque. Il commence par démystifier l'utilisation de l'éclipse pour dater Archiloque.
  Et d’abord, nous ne saurions accepter comme décisive l'indication chronologique en apparence la plus sûre, dont MM. Beloch et Crusius font volontiers le point de départ de toute biographie historique de notre auteur. Archiloque a parlé dans ses vers d‘une éclipse de soleil, éclipse totale, survenue en plein midi, comme d’un événement qui a jeté le trouble parmi les hommes. Un phénomène aussi bien défini ne pouvait échapper aux investigations rétrospectives de la science: les astronomes, et en dernier lieu M. Oppolzer ont calculé, pour la période qui s’étend du VIIIe au Ve siècle avant notre ère, les dates auxquelles une éclipse totale a été visible dans le bassin de la mer Egée, soit au sud, du côté de Paros et de Naxos, soit au nord, à Thasos et sur les côtes de la Macédoine et de la Thrace; or ces calculs ont donné des résultats qui s’imposent: entre l’éclipse totale du 15 juin 763 et celle du 28 mai 585, une seule répond aux conditions du problème, c’est l’éclipse totale du 6 avril 648, visible à Thasos, à 9‘52'44‘ du matin. Trois éclipses partielles, survenues dans le cours du VIIe siècle (en 689, 661, 635), n’auraient pas produit sur la foule l’impression profonde qu’atteste le poète; une dernière, celle du 15 avril 657, n’a été totale que pour les pays situés à l’est de Rhodes; elle ne saurait entrer, elle non plus, en ligne de compte. Archiloque était donc à Thasos au mois d'avril 648 : voilà, dit-on, un fait acquis à la science!
  Dans ce raisonnement, c’est la base qui nous paraît peu solide. Non pas que le fragment lui-même, qui contient l’allusion à une éclipse de soleil, soit d’une authenticité douteuse : attribué par Stobée à Archiloque. il est cité en outre par Aristote, avec une précision qui exclut toute chance d‘erreur. Mais c’est justement parce que le sens général du morceau nous est donné par Aristote avec l‘indication de certaines circonstances particulières, que nous ne pouvons pas l‘interpréter à notre gré.
...
Aristote dit expressément que ce morceau contenait un blâme, et que, par une sorte de figure de rhétorique, le poète, pour ne pas faire entendre directement ce blâme, le mettait dans la bouche d’un père parlant, non pas à sa fille, mais au sujet de sa fille. Voilà des circonstances nettement formulées, qui sans doute ne nous éclairent pas assez sur l’interprétation du fragment, mais qui suffisent à établir que l’idée de l’éclipse n'a pas été déterminante dans la pensée d’Archiloque, qu’elle s'est présentée à son esprit comme un exemple des surprises que les dieux réservent parfois à l'homme. Dès lors, cet exemple peut avoir été choisi dans une expérience déjà ancienne, peut-être même traditionnelle, ou dans des souvenirs plus récents, mais qui se rattachaient à un événement dont le poète lui-mème n’avait pas été le témoin oculaire. N’avait-on pas entendu parler à Paros, en 657, d'une éclipse totale, visible dans l'île de Rhodes? Il serait absurde de prétendre qu’un phénomène aussi rare n’avait eu aucun retentissement dans le monde grec de l'Archipel, et cette possibilité seule ébranle, ou plutôt ruine tout le système qui s‘appuie sur cette base fragile.


Effectivement, le passage sur l'éclipse n'a rien d'un compte rendu d'observation, même ancien, mais évoque bien un argument qui ne nécessite que la connaissance du phénomène par Archiloque, quelqu'en soit le moyen. Et ce phénomène a pu se produire ailleurs, et/ou dans le passé.
L'auteur démystifie ensuite deux autres fragments utilisés pour dater Archiloque. On utilise un de ses fragments où il parle du roi Gygès, pour en déduire qu'il était encore vivant à la mort de ce roi. L'auteur montre alors que c'est encore un argument littéraire qui prouve seulement qu'il a été énoncé après l'avènement de Gygès. Et de fait ce fragment dit: Je ne me soucie pas de Gygès et de ses trésors. L’envie n’a jamais habité mon cœur et je n’ai point de colère contre l’ordre établi des dieux. Je ne souhaite pas l’altière puissance d’un tyran. Tout cela est bien loin de mes yeux.(fragment 15). Difficle d'y voir un repère chronologique.
Puis l'auteur démystifie de la même façon l'utilisation d'un fragment où Archiloque parle des malheurs des Magnètes. Enfin, il trouve quelques repères utilisables.

Considérons donc enfin ces indications chronologiques elles-mêmes. Tout d’abord, se présentent deux témoignages qui dérivent sans doute l’un et l’autre de quelque source grecque, mais par l’intermédiaire d’une chronologie romaine. Cicéron dit qu’Archiloque vivait sous le règne de Romulus (752-716) ; Cornélius Népos, que ce poète était déjà connu et célèbre sous le règne de Tullus Hostilius (671-640)
  De ces deux données, la première ne doit pas nous arrêter longtemps : si elle ne provient pas d‘une simple confusion de chiffres, peut-être se rattache-t-elle à la tradition qui plaçait en 720 (Ol. XV) la fondation de Thasos. En tout cas, elle est en contradiction avec les indications chronologiques les plus généralement admises. La seconde, au contraire, nous apprend un fait intéressant, et plus précis en réalité qu’il n’en a l’air d’abord. Quand il s’agit d’un règne de trente ans, dire d’un homme qu’il était « déjà » célèbre sous ce règne, c’est laisser entendre de deux choses l’une : ou bien que ce personnage est arrivé à la célébrité dans les derniers temps du souverain en question, ou bien qu’il était déjà connu dès l’avènement de ce prince. Dans le premier cas, le personnage ainsi désigné est censé avoir atteint après la fin du règne la plénitude de sa renommée; dans le second, il apparaît comme assez jeune encore au début. Or, de ces deux alternatives, une seule est acceptable pour Archiloque, c’est la seconde ; car personne ne soutient que l’activité poétique d’Archiloque se place postérieurement à l’année 640. Il faut donc conclure que le poète de Paros avait déjà conquis en 671 quelque célébrité, et que le plein épanouissement de sa réputation se produisit dans les dix premières années de Tullus Hostilius.
...
Il nous faut donc rejeter la tradition qui plaçait l’acmé d’Archiloque autour de» XXlll° olympiade (688), et cette raison nous ramène naturellement à l'autre donnée d’Eusèbe, à l’année 665 avant Jésus-Christ.
 Si Archiloque avait alors environ quarante ans, il en avait une vingtaine seulement dans le cours de la XXlll° olympiade. Cette date, notée par les chronographes, marquerait donc pour nous le début de ses aventures et de ses poésies guerrières : elle inaugurerait, pour ainsi dire, la période thasienne de sa vie. L’année 665 correspondrait plutôt à l'époque de son séjour a Paros et de ses démêlés avec les personnages qu’il a poursuivis de ses plus vives invectives.
  Nous ne savons pas la date de sa mort; mais on a vu plus haut que rien ne nous obligeait à la retarder jusqu’après la chute de Gygès (652), la destruction de Magnésie (651) ou l’éclipse de 648.

Note: Résumons. La production poêtique d'Archiloque s'inscrirait surtout dans la décennie précédant l'an 660 av. J.C, donc bien avant l'éclipse de 648, et c'est très probablement une autre éclipse qu'Archiloque a utilisé comme argument sans l'avoir vu lui même.
(Amédée Hauvette, Archiloque sa vie et ses poésies, Albert Fontemoing, 1905, chapitre premier)

1920. J. K. Fotheringham confime Oppolzer, sans savoir quelle île est la bonne.


J. K. Fotheringham
John Knight Fotheringham, historien britannique, fut un expert en chronologie et en histoire de l'astronomie. Il fit la chronologie des dynasties babyloniennes, et fut membre de la Royal Astronomical Society.
(3) The eclipse of Archilochus. -Archilochus, fr. 74, in Bergk, Poetae Elegiaci et Iambographi (1915):
“ Nothing there is beyond hope, nothing that can be sworn impossible, nothing wonderful, since Zeus father of the Olympians made night from midday, hiding the light of the shining sun, and sore fear came upon men.”
  The eclipse was identified by Oppolzer.§ The description clearly refers to a total eclipse, and there is a presumption that Archilochus saw it. As the life of Archilochus was divided between Paros and Thasos, with occasional travels elsewhere, the presumption is that the eclipse was total either at Paros or at Thasos. I find by computation that the width of the belt of totality is practically equal to the distance between these islands, and I have therefore assumed that the eclipse was total somewhere between the limits λ 24°.56, φ 40°.78 and λ 25°.25, φ 37°.01, and have not thought it necessary to exclude any part of the intervening space. The computed time of the eclipse falls about ten in the morning instead of at midday. But a tendency to transfer eclipses to midday will be found again in the cases of the eclipses of Phlegon and Plutarch.

§ Sitzungsberichte der k. Akad. der Wissenschaften, Vienna, Math.-nat. Classe, 86 (1882), 790-3.



trajet de l'éclipse de 648 av. J.C.
L'éclipse d'Archiloque. -Archiloque fragment 74, dans Bergk, Poetae Elegiaci et Iambographi (1915):
"Il n'y a rien sans espoir, rien qui puisse être juré impossible, rien d'étonnant, puisque Zeus père des Olympiens a fait la nuit à midi, cachant la lumière du soleil qui brillait, et une terrible crainte saisit les hommes."
  L'éclipse a été identifié par Oppolzer.§ La description se réfère clairement à une éclipse totale, et il y a une présomption qu'Archilochus l'ait vu. Comme la vie d'Archiloque a été partagée entre Paros et Thasos, avec des déplacements occasionnels ailleurs, la présomption est que l'éclipse était totale, soit à Paros ou à Thasos. Je trouve par le calcul que la largeur de la bande de totalité est pratiquement égale à la distance entre ces îles, et j'ai donc supposé que l'éclipse totale était quelque part entre les limites λ 24°.56, φ 40°.78 and λ 25°.25, φ 37°.01, et n'ai pas pensé nécessaire d'exclure une partie de l'espace intermédiaire. Le temps calculé de l'éclipse tombe vers dix heures du matin au lieu de midi. Mais une tendance à placer les éclipses à midi se retrouvera dans les cas des éclipses de Phlégon et Plutarque.

Note: Mon pauvre monsieur, vous n'avez apparemment pas de chance. Effectivement la largeur de la bande de totalité est pratiquement égale à la distance entre Thasos et Paros, et donc si l'éclipse n'était pas totale sur une île, elle devait l'être sur l'autre. Malheureusement la carte d'Espenak montre que la bande de totalité s'est malicieusement glissée pile entre les deux. Cependant, il faut tenir compte d'une certaine incertitude sur la longitude. D'après la formule polynomiale donnée par Espenak et Meeus, l'erreur type serait de 2°, ce qui permettrait à l'éclipse d'avoir été totale, soit à Tasos, soit à Paros. Malheureusement, non seulement il n'est pas prouvé qu'Archiloque ait été dans la bonne île lors de cette éclipse, mais son poême était probablement écrit depuis longtemps lorsqu'elle s'est produite.
(Dr. J. K. Fotheringham, A Solution of Ancient Eclipses of the Sun, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, déc 1920, p 107)

1947, François Lasserre identifie le narrateur comme le père d'Archiloque.

Hélléniste et philologue, François Lasserre va nous permettre de retrouver le narrateur du fragment d'Archiloque, à travers le commentaire d'Aristote.
Aristote, citant le premier vers de ce fragment, rapporte qu'Archiloque avait imaginé de faire prononcer par un certain père le blâme qu'il desirait adresser à la fille de celui-ci. Ce stratagème est présenté comme un exemple du procédé de rhétorique qui consiste, lorsqu'on désire exprimer son opinion sur quelqu'un mais éviter qu'on ne puisse vous accuser d'etre méchant ou grossier, à la placer dans la bouche d'un tiers. Nous apprenons, plus exactement, que le père dont il est question visait sa fille dans son discours sans, apparemment, lui parler en particulier.
...
Aristote ecrit d'Archiloque: ποιεί γάρ τόν πατέρα λέγοντα περί τής ϑυγατρός . Brugmann-Thumb, § 496, 3 (p. 485s.), est formel: tout substantif, exception faite pour les noms propres, est précédé d'un article défini lorsqu'il correspond, dans l'esprit de l'auteur et de ses lecteurs, à une notion définie préalablement, universellement connue, ou lorsqu'il se définit au moment même sans l'aide de l'article. Cela revient à dire que l'article n'accompagne qu'un mot dont le sens est déjà déterminé dans sa compréhension et limité dans son extension. Cet emploi correspond à peu pres à celui de l'article défini francais.
...
Cependant, comme l'emploi de l'article atteste que πατέρα était déterminé dans l'esprit d'Aristote, on est obligé de chercher dans l'exemple même sa détermination. Des lors τόν ne peut avoir d'autre valeur que celle d'un possessif. II est d'autant plus surprenant que personne ne s'en soit encore avisé que ce sens de l'article défini est presque le seul possible devant un nom de parenté, si la relation de parenté n'est pas définie d'une autre manière, ...
II s'agirait donc du père d'Archiloque, celui à qui la tradition donne le nom de Télésiclès. Le choix de ce porte-parole s'accorde exactement avec tous les parallèles que cite Aristote: dans le Philippe (5, 4) Isocrate substitue à son opinion personnelle, evidemment partiale, celle du peuple, et dans l'Antidosis (15, 132-139) il a recours au temoignage d'un tiers désintéressé; dans l'iambe 22, Archiloque fait parler un homme du peuple, dont l'autorité est garantie par son impartialité dans le débat que nous pouvons supposer et par son bon sens.

Note: On peut s'étonner que ce soit la philologie grecque qui fasse avancer la résolution d'un problème dont la base est un phénomène astronomique. Mais le résultat est là: le narrateur est probablement Télésiclès, père d'Archiloque. Le pire est que l'argument de la non-impossibilité a priori est peut-être de lui, qui avait plus de chance que son fils d'avoir entendu parler de l'éclipse de 711 av.J.C, totale en Grèce et à Thasos.
(François Lasserre, Le Fragment 74 d'Archiloque, Museum Helveticum, vol. 4, 1947, fasc. 1, p 1)

1961, Paul Couderc confirme l'éclipse.


Paul Couderc
L'astronome Paul Couderc fut un bon vulgarisateur qui écrivit plusieurs ouvrages dans la collection "Que Sais-je?", notamment Le Calendrier, La relativité, L'histoire de l'astronomie et l'Astrologie. Ici, il en fait un sur les éclipses, mais avec les connaissances de son temps.
Eclipse d’Archiloque. - Ce poète grec, qui vécut de - 700 à - 640 environ, rapporte :« Rien n’est impossible, ni incroyable, depuis que Zeus changea en nuit le milieu du jour, en même temps qu’il voilait la lumière du brillant Soleil; une vive frayeur saisit les hommes. » Archiloque vécut à Paros et à Thasos. Parmi toutes les éclipses calculées pour la durée de sa vie, deux seulement furent totales auprès de ces deux îles, en - 656 (14 avril) et en - 647 (5 avril), l’une et l’autre vers 10 heures du matin. Le calcul montre que la première ne fut peut-être pas totale - ou que sa totalité, si elle eut lieu, fut très brève. La seconde, au contraire, dura 5 minutes à Thasos. La date du 5 avril - 647 est désormais acceptée.
Note: Ce passage reflète les connaissances des années 50, où on était moins enclin qu'aujourd'hui à relativiser le savoir astronomique antique.
(Paul Couderc, Les éclipses, QSJ 940, 1961, p 108)

1970, Robert R. Newton pense à une "éclipse littéraire".


Robert R. Newton
Robert R. Newton est connu pour le scepticisme qu'il a professé à l'égard des observations astronomiques antiques, (et ce n'est pas l'examen des prodiges que nous citons qui l'aurait fait changer d'avis). Spécialiste du problème de l'accélération séculaire de la lune, et donc du ralentissement de la rotation terrestre, il a publié un premier livre en 1970, suivie d'autres études où il a montré la trop grande crédulité des chercheurs vis à vis des éclipses anciennes. Son ouvrage de 1970 n'étant pas en accès libre, nous savons seulement qu'il a cité l'éclipse d'Archiloque comme un exemple d'éclipse "littéraire".
    - 647 Apr 6 M (Archilochus). References: Ginzel (1899); Fotheringham (1920). "Nothing there is beyond hope, nothing that can be sworn impossible, nothing wonderful, since Zeus father of the Olympians made night from midday, hiding the light of the shining sun, and sore fear came upon men." The translation is by Fotheringham.
...
The passage is by the greek poet Archilocus. Ginzel gives an independent translation that agrees with Fotherinham...

- 6 avril -647 (Archiloque). Sources: Ginzel (1899); Fotheringham (1920). "Il n'y a rien sans espoir, rien qui puisse être juré impossible, rien d'étonnant, puisque Zeus père des Olympiens a fait la nuit à midi, cachant la lumière du soleil qui brillait, et une terrible crainte saisit les hommes." La traduction est de Fotheringham.
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Ce passage est du poête grec Archiloque. Ginzel donne une traduction indépendante qui s'accorde avec celle de Fotheringham...

(Robert R. Newton, Ancient astronomical observations and the accelerations of the Earth and Moon.,Johns Hopkins Press, 1970, p 91)
Note: nous n'arrivons pas à retrouver la discussion qui suit immédiatement, mais Newton emploie plusieurs fois dans ce libre l'expression "literary eclipse" pour des éclipses inventées dans un but poêtique (où il range celle d'Archiloque) et qu'il distingue des "magical eclipses" et des "assimilated eclipses".

Après cette première mise en garde, Newton précise sa pensée dans d'autres études, où il dénonce les fausses éclipses, en les classant en éclipses erronément citées, éclipses littéraires, éclipses assimilées et canulars. Les éclipses assimilées sont datées de façon arbitraire pour les faire correspondre à un évènement historique, et cela semble être le cas pour l'éclipse de la mort d'Hérode.Ceci lui donne l'occasion de reparler de l'éclipse d'Archiloque:

(2) The 'literary' eclipse. Mark Twain (Clemens 1889) and Haggard (1886) insert total eclipses of the sun into their action for literary purposes. These 'eclipses' may be taken as archetypes of the 'literary eclipse'. The 'eclipse' described by Anna Comnena (ca. 1120, chap. vil. 2) is the earliest example I have found in which a person uses the ability to predict an eclipse in order to confound an uneducated opponent. Plutarch (ca. 90) uses an eclipse description for literary purposes, but without using it to confound the ignorant, and he mentions many other 'literary eclipses', such as the 'eclipse ofArchilochus', that were already classic in his time.
Probably no one would be more surprised than these writers (with the possible exception of Anna) to find that their literary eclipses were being used as valid astronomical observations by modern scholars, but this has often happened. Sometimes the 'eclipse' is first identified as to date and the result used to date the composition of the literary work. Sometimes the work is dated independently and the result used to 'identify' the eclipse. Analysis of this sort is based upon the tacit assumption that the writer wrote the passage immediately after seeing a total eclipse.

(2) L'éclipse «littéraire». Mark Twain (Clemens 1889) et Haggard (1886) insérent des éclipses totales de soleil dans leurs actions à des fins littéraires. Ces «éclipses» peuvent être considérés comme des archétypes de l'«éclipse littéraire». L'«éclipse» décrite par Anne Comnène (ca. 1120, chap. Vil. 2) est le plus ancien exemple que j'ai trouvé dans laquelle une personne utilise la capacité de prédire une éclipse pour confondre un adversaire sans instruction. Plutarque (environ 90) utilise une description d'éclipse à des fins littéraires, mais sans l'utiliser pour confondre l'ignorant, et il mentionne de nombreux autres «éclipses littéraires», comme l'«éclipse d'Archiloque», qui étaient déjà classique de son temps.
Personne ne serait probablement plus surpris que ces auteurs (avec l'exception possible de Anna) pour constater que leurs éclipses littéraires ont été utilisés comme des observations astronomiques valides par les savants modernes, mais cela est souvent arrivé. Parfois, l'«éclipse» est d'abord identifié comme étant à cette date et le résultat utilisé pour dater la composition de l'œuvre littéraire. Parfois, le travail est daté de façon indépendante et le résultat utilisé pour «identifier» l'éclipse. Une analyse de ce genre est basé sur l'hypothèse tacite que l'auteur a écrit le passage immédiatement après avoir vu une éclipse totale.

Note: Ces remarques s'appliquent tout à fait à l'éclipse d'Archiloque, er rejoignent celles d'Amédée Hauvette, citées plus haut.
(Robert R. Newton, TWO USES OF ANCIENT ASTRONOMY, Phil. Trans. R. Soc. Land. A. 276, 1974, p 99)

Il en reparle en mentionnant le "jeu de l'identification", un jeu où on prouve l'éclipse par le récit historique, et le récit historique par l'éclipse.
  To play the identification game, the player started by calculating the magnitudes of all eclipses in the possible time frame that could have been seen at the place given in the record. The eclipse with the largest calculated magnitude was taken to be the correct one.
  An example of an eclipse that was widely used in the astronomical literature is the so-called "eclipse of Archilochus". Archilochus was a Greek soldier and a poet whose poems can be dated only as being between about -710 and -640. Part of one of his poems is translated in Ref. 5: "Zeus...made night from midday, hiding the light of the shining sun, and sore fear came upon men."
  There are several things wrong with using this passage of poetry as an eclipse record in the astronomical literature. For one thing, the passage does not say that the darkness was caused by an eclipse. There is the phenomenon called a dark day, which probably happens at a particular place as often as a central eclipse of the sun does. A dark day is probably caused by weather conditions, and it is just as impressive as an eclipse. However, let us grant that the passage does refer to an eclipse and see where it leads us.
  Those who want to use the passage as an eclipse record are forced to assume that Archilochus could have written it only if he had personally witnessed the eclipse. Since one of the characteristics of a poet is his imagination, Archilochus could have imagined the effect of seeing an eclipse if he had ever read or heard about one.

  Pour jouer au jeu de l'identification, le joueur a commencé par calculer les grandeurs de toutes les éclipses dans le laps de temps possible qui aurait pu être vu à l'endroit indiqué dans le dossier. L'éclipse avec la plus grande magnitude calculée a été prise pour être la bonne.
  Un exemple d'une éclipse qui a été largement utilisé dans la littérature astronomique est la soi-disant "éclipse d'Archiloque". Archiloque était un soldat grec et un poète dont les poèmes peuvent être datés seulement comme étant comprise entre environ -710 et -640. Une partie de l'un de ses poèmes est traduit dans Réf. 5: "Zeus... a fait la nuit à midi, cachant la lumière du soleil qui brillait, et une terrible crainte saisit les hommes."
  Il y a plusieurs erreurs avec l'utiliation de ce passage de poésie comme un enregistrement d'éclipse dans la littérature astronomique. D'une part, le passage ne dit pas que l'obscurité a été causée par une éclipse. Il y a un phénomène appelé jour sombre, qui arrive à un endroit particulier probablement aussi souvent qu'une éclipse centrale de soleil. Un jour sombre est probablement causé par les conditions météorologiques, et il est tout aussi impressionnant qu'une éclipse. Cependant, admettons que le passage fait référence à une éclipse et voyons où cela nous mène.
Note: L'auteur a raison d'examiner les autres hypothèses, mais celle du "jour sombre" s'applique mal. D'une part le jour sombre est souvent la conséquence d'un violent orage, avec chute d'énormes grélons, voire tornade, d'autre part Archiloque dit bien que le soleil était brillant ( λαμποντος ) quand Zeus le voila, et que l'épouvante saisit les hommes, ce qui s'accorde avec l'arrivée soudaine de l'obscurité lors d'une éclipse totale.
  Ceux qui veulent utiliser le passage comme un enregistrement de l'éclipse sont obligés de supposer qu'Archilochus n'aurait pu l'écrire que s'il avait été personnellement témoin de l'éclipse. Puisque l'une des caractéristiques d'un poète est son imagination, Archilochus aurait pu imaginer l'effet de voir une éclipse s'il avait déjà lu ou entendu parler d'une.

Note: Effectivement, comme l'expliquait déja Amédée Hauvette, il suffisait qu'Archiloque en eut entendu parler. Il n'a même pas eu besoin d'imaginer l'épouvante qui aurait saisi les hommes, puisqu'il pouvait tout aussi bien en avoir eu connaissance aussi.
(Robert R. Newton, THE SECULAR ACCELERATION OF THE EARTH'S SPIN, Johns Hopkins APL Technical Digest, v.6, 1985, p 120)

21ème siècle, The Gallery of Natural Phenomena entérine l'éclipse d'après celui qui la réfute.
647 April 6
Eclipse
Greece
" Zeus, father of the Olympians, made night from mid-day, hiding the light of the shining sun, and sore fear came upon men. "Total solar eclipse in the Mediterranean, 647 BC April 6. (30)
30. R. R. Newton. Medieval Chronicles and the Rotation of the Earth, John Hopkins University Press, 1972, The Moon's Acceleration and its Physical Origins. John Hopkins University Press, 1984

6 avril (-) 647
Eclipse
Grèce
"Zeus, père des Olympiens, fit la nuit à la mi-journée, cachant la lumière du soleil qui brillait, et une terrible crainte saisit les hommes. "Éclipse totale de soleil en Méditerranée, le 6 avril 647 av. J.C.

Note: en réalité, c'est 648 av. J.C = -647. Quant à la Source c'est: Robert R. Newton ,Ancient Astronomical Observations and the Accelerations of the Earth and Moon, et comme nous venons de le voir, il met beaucoup d'énergie à démystifier l'éclipse prétenduement observée par Archiloque.
The Gallery of Natural Phenomena

Analyse:
Au départ, un fragment d'un vieux poême grec, commenté par Aristote.
A l'arrivée, une éclipse de soleil datée, située, avec la caution des plus hautes autorité.
On peut s'émerveiller devant cette magie de la science moderne, capable de transmuter un fragment d'une archaïque littérature, en savoir scientifique précis. Mais on peut aussi chercher à comprendre, par quel miracle de "wishfuk thinking" une telle chose a été possible.

Remarquons d'abord que ceci est une conséquence de la "collectionnite" qui a saisi de nombreux chercheurs qui voulaient faire un catalogue de phénomènes astronomiques antiques plus complet que celui de leurs prédécesseurs, ou collègues. Un exemple navrant en est le catalogue de comètes de Georgius Caesius, qui n'avait pas hésité à en inventer pout avoir des comètes que les autres n'avaient pas. La "collectionnite" implique ne ne pas être trop regardant sur l'authenticité des cas qu'on mentionne, pour ne pas voir son catalogue rétrécir comme une peau de chagrin. Résultat: au lieu d'être pleins d'observations antiques, ces catalogues sont pleins d'observations en toc. Et ceci vaut pour tous les types de catalogues: comètes, aurores boréales, éclipses, OVNI, météorites, etc... Le fameux catalogue de chutes de météorites de Chladni ne contient, pour les cas d'avant notre ère, qu'une seule chute probable, et encore est elle datée erronément.

Une autre cause est l'autorité de la source. Car si Archiloque n'était qu'un poête, Theodor Ritter von Oppolzer était une autorité en matière d'éclipse. Et c'est ainsi qu'on voit Millosevich monter au créneau pour défendre l'éclipse d'Oppolzer, menacée par la contradiction du calcul et de la carte du Canon der Finsternisse

Une troisième cause nous paraît être la croyance naïve, la foi du charbonnier, envers une certaine science supposée infaillible. Or la mécanique céleste, avec ses lois mathématiques paraît bien dans ce cas. Joseph Scaliger, qui a voulu étalonner la chronologie à l'aide des phénomènes astronomiques, a, certes, eu une bonne idée, mais encore faut il savoir ce que vaut l'étalon. On oublie que pour les observations antiques, il ne s'agit pas seulement de mécanique céleste, mais aussi de géophysique, d'histoire, d'archéologie, de philologie, etc... sciences indispensables à l'analyse complète du problème, qui est l'adéquation d'une source, imparfaitement comprise, à l'observation d'un phénomène, imparfaitement connue. Car si le mécanisme des éclipses est bien compris, la localisation géographique de la bande de totalité d'une éclipse de soleil, dépend de la rotation terrestre dont la variation séculaire ne peut justement se déterminer qu'en étudiant les éclipses. Et c'est ainsi qu'en croyant faire de la science, on se retrouve à expliquer l'oeuf par la poule, et la poule par l'oeuf.

Pour en revenir à l'éclipse dite d'Archiloque, nous avons vu que si le texte d'Archiloque s'accorde bien avec l'observation d'une éclipse totale, rien n'indique qu'Archiloque l'ait vu lui même, et que tant la chronologie que la géographie s'opposent à ce qu'il ait été témoin d'une éclipse totale. Il a bien pu assister à une éclipse partielle ou annulaire, comme celles de 689 ou de 661 av. J.C. Mais l'éclipse dont parle Archiloque à fait la nuit au milieu du jour et ne correspond donc pas.
Mais puisqu'il s'exprime dans un poême utilisant un procédé littéraire, il avait bien le droit d'utiliser comme argument, un phénomène étonnant vu par d'autres, puisqu'aussi bien, nous voyons tous les jours argumenter sur la base de faits entrés dans l'histoire et non observés par le narrateur. Comme nous l'ont expliqué Amédée Hauvette et Robert R. Newton, pour mentionner cette éclipse, il suffisait qu'il en ait lui même entendu parler.
Par ailleurs, selon François Lasserre, Archiloque met en scène son père Télésiclés. Or ce père était déjà assez agé en 684 av. J.C. pour diriger la colonisation de Thasos. Il pourrait donc être né aux alentours de l'an 730 av. J.C, et pourrait avoir été témoin de l'éclipse de 711 av. J.C., à ce détail près qu'on ignore où il se trouvait alors.


trajet de l'éclipse de 711 av. J.C.
Il nous suffit donc d'examiner les éclipses totales de cette époque (leurs cartes figurent sur cette page).

L'éclipse de 648 av. J.C. ne parait pas devoir être retenue puisque, qu'Archiloque soit encore vivant ou non, son poême avait du être écrit bien avant.

L'éclipse de 657 av. J.C. ne fut pas totale à Rhodes, comme le pensait Amédée Hauvette, mais à Chypre, ce qui rend moins plausible qu'Archiloque en ait eu connaissance.

L'éclipse de 711 av. J.C. fut totale sur une grande partie de la Grèce et de la Macédoine. A Thasos le maximum eut lieu à 10H 18 mn en temps moyen local. Même en tenant compte d'une incertitude de 2° (la largeur du Péloponèse) On comprend que de nombreux grecs en furent surpris et en gardèrent le souvenir. C'est donc probablement de cette éclipse, dont de nombreux témoins vivaient encore de son temps que parle Archiloque.

Désolé pour Oppolzer, Millosevich, Lynn, Stockwell, Flammarion, Ginzel, Fotheringham et Couderc, mais ce n'est pas avec la foi du charbonnier qu'on fait de la bonne science.

Dernière mise à jour: 02/03/2016

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