Pour faire diversion Fricoulet demanda:
– J’ai entendu soutenir quelquefois cette théorie que Vénus avait un satellite.
Gontran considéra son ami avec stupeur, le croyant devenu fou subitement; mais sa surprise fut bien plus grande encore, lorsqu’il entendit Ossipoff répondre en hochant la tête:
– Beaucoup d’astronomes ont cru voir, en effet, le satellite dont vous parlez; quant à moi, malgré les nombreuses brochures publiées à ce sujet, je persiste à considérer son existence comme problématique… vous me répondrez qu’il est difficile, d’un autre côté, d’admettre que des savants comme Cassini, Horrebow, Short et Montaigne aient mal vu ou aient pu prendre, pour argent comptant, une illusion d’optique.
– Alors comment expliquer?...
– Pour moi, il n’y a que deux explications possibles: ou bien, ils ont pris pour un satellite de Vénus une petite planète passant dans le même champ optique, ou bien ce satellite, très petit, n’est visible de la terre que dans des conditions tout à fait exceptionnelles.
– Il se peut encore, observa Gontran, que, depuis ces observations, ce satellite soit tombé sur la planète.
– Cette supposition n’a rien d’invraisemblable: aucune loi naturelle ne s’opposant à ce qu’un semblable phénomène puisse se produire.
Georges Le Faure et Henry de Graffigny, AVENTURES EXTRAORDINAIRES D’UN SAVANT RUSSE, Volume II, LE SOLEIL ET LES PETITES PLANÈTES, Edinger, 1889