1984 Marc Hallet attaque les crédules, mais se trompe

Hallet
Marc Hallet
Marc Hallet, né en 1952 est un de ces nombreux ufologues qui ont commencé à s'intéresser aux OVNI sous l'angle de l'hypothèse d'incursions extraterrestres, hypothèse largement majoritaire chez les ufologues de l'époque. Il s'intéressa même au "contacté" George Adamski, à ses pompes et à ses oeuvres, au point de fréquenter pendant 10 ans le petit groupe belge qui lui servait de relais, et dont l'animatrice était une de ses proches collaboratrices. Il vécut ainsi l'Adamskisme de l'intérieur, avant de se rendre compte qu'on lui avait fait prendre des vessies pour des lanternes.

Il se lança alors dans la demystification, et en particulier, dans celle du mythe Adamskiste, et publia plusieurs ouvrages, notamment une traduction de Inside the spaceships, de Georges Adamski, puis Le cas Adamski, parallèlement à des livres sur des sujets apparentés comme les apparitions mariales.

Ici, son livre ressemble un peu trop à un règlement de compte, avec des ufologues qu'il estime l'avoir trompé pendant trop longtemps.
Malheureusement, en se basant sur trop peu de sources, qui, elles mêmes s'étaient basés sur trop peu d'autres, il n'a pas compris que le récit qu'il prétendait démystifier n'était qu'une fiction, et démystifier une fiction, c'est à peu près aussi méritoire que de tirer sur un corbillard.


  - Quel sera votre exemple suivant?
  - Magonia.
  - Magonia? Vous voulez parler de ce célèbre cas qui met aux prises 1'Evêque Agobard avec des navires aériens et leurs pilotes venus, disaient-ils, d'une contrée appelée Magonia ou Magonie?
  - Sans doute vous souvenez-vous que ce ces a été repris un peu partout et qu'il fut même cité par C. Piens et Michel Bougard qui ont signé respectivement, chacun de leur côté, un livre consacré aux observations ufo anciennes.
  - Oui; et c'est ce cas qui est également à l'origine du titre d'un livre de Vallée : Passport to Magonia.
  - Ouvrage que voici et que nous allons bientôt parcourir ensemble. Ce cas vous semble donc avoir été étudié sous toutes ses coutures par des ufologues très compétents n'est-ce pas? Mais pensez-vous qu'il fut jamais situé correctement dans son contexte historique?
  - Euh... je crois.
  - Vous croyez! Eh bien vous avez tort de croire. Ce qu'aucun ufologue n'a écrit, c'est ce que J. Garinet a précisé en page 65 de son ouvrage consacré å la sorcellerie en France : "Toute cette fable extravagante ne se trouve ainsi détaillée que dans les cabalistes".
Note: C'est effectivement une fable extravagante, seulement Garinet ne l'a pas lu chez les "cabalistes". Il l'avait copié chez Collin de Plancy, qui l'avait lui même pris dans la fiction de Montfaucon de Villars, qui n'avait jamais fait que caricaturer les doctrines "cabalistes". Cette appréciation de Garinet n'a donc rien à voir avec le livre d'Agobard. Quant à la page 65, c'est dans l'édition de 1970. Dans l'édition originale, c'était page 37.
Etrange époque que celle durant laquelle apparut ce récit aujourd'hui fameux : il n'était question que de fées, de sylfes, de sylphides, de diables et de démons de toutes sortes. Hommes et femmes s'imaginaient avoir commerce charnel avec des démons incubes ou succubes (tíens! Antonio Villa Boas n'était pas le premier...). Autant de folles superstitions engendrées par réaction envers une religion trop contraignante. Un climat d'occultisme absurde! C'est dans ce creuset de croyances ridicules que naquit le texte relatif à la Magonie.
Tout ceci est historiquement faux, et ne sort que du livre de Jules Garinet
Et c'est dans un ouvrage violemment antisémite (la cabale était d'origine juive) qu'Agobar, Evêque de Lyon, lutta contre ces superstitions.
Note: Cette légende de l'ouvrage antisémite sort de l'article de Michel Bougard de 1975. Le livre d'Agobard ne contient rien à propos des juifs. Agobard n'était d'ailleurs pas antisémite, mais plutôt antijudaïste, dans la mesure ou il était en conflit avec les juifs de Lyon, pour leurs privilèges qu'il n'admettait pas.
On veut que cet Evêque ait vu de ses propres yeux une machine volante. Ce n'est pas du tout ce qu'il écrivit! Il vit, dit-il, trois hommes et une femme que la foule accusait d'être des sorciers ou des magiciens descendus d'un navire volant.
Ce n'est pas ce qu'il écrivit non plus. Il dit qu'on lui amena trois hommes et une femme, prétendument "tombés" d'un navire aérien.
A propos de cet objet, on ne possède donc aucun témoignage à proprement parler; ou plutôt on dispose d'un témoignage indirectement négatif d'un homme qui tenta de calmer une foule en délire. Nuance!
Agobard ne dit pas que la foule accusait les quatre prisonniers, ni qu'elle était en délire. Il dit qu'il confondit les accusateurs.
Ailleurs, Agobar dit qu'on vit des armées dans le ciel; mais une fois encore, il ne se présente pas comme un témoin direct de ces choses, mais plutôt comme un rapporteur impartial de rumeurs incontrôlées.
Agobard ne dit pas qu'on vit des armées dans le ciel; C'est Jules Garinet qui le prétend. Agobard était mort depuis deux ans quand ce phénomène survint.
Chacun sait ou devrait savoir qu'à l'époque de ces faits prétendus, de nombreux phénomènes célestes naturels furent décrits par des foules superstitieuses de façon particulièrement originale. L'exemple des comètes décrites sous forme de poignards, épées et armées au combat est célèbre.
Note: A l'époque d'Agobard, comme à toutes les époques, on a interprété les phénomènes célestes naturels avec ce qu'on croyait savoir. Quant à l'exemple de la comète, il est vraiment mal choisi, car il s'agissait d'une aurore boréale, survenue sept siècles après l'époque d'Agobard.


SOURCE: Carl Mathel (Marc Hallet), L'ufologie: domaine organise de...l'absurde!, 1984, p. 10-11

Remarques:

Marc Hallet a l'air remonté contre Vallée, Bougard et Piens, dont il veut réduire les affirmations à néant. Pour ce faire il utilise l'édition de 1970 du livre de Garinet. Mais il est plaisant de constater que Christiane Piens et Michel Bougard, reprenaient les informations de l'article de Michel Bougard de 1975, qui avait puisé dans l'article de 1970 de Francis Schaefer, qui avait puisé.... dans cette même édition de 1970 du livre de Garinet. Ainsi, à partir d'un même livre, on a sorti deux thèses diamétralement opposées, mais aussi erronées l'une que l'autre.

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