2009 Jean Prost récidive
Trente ans après avoir dessiné les images du Temps des cathédrales, qui suivait, tant bien que mal, l'histoire originelle, Jean Prost nous ressort à sa façon, l'histoire d'Agobard et des tempestaires. A sa façon car, si dans la bande dessinée de 1979, Jean Delas et André Pelletier avaient su séparer le réel et l'imaginaire, les faits présentés par Agobard, comme des croyances stupides, sont ici présentées comme des faits réels.
Mais oui les tempestaires existaient bien, mais oui ils déclenchaient réellement les orages qui couchaient les moissons, mais oui ils revendaient - devant témoins - ces moissons aux magoniens, venus sur leurs vaisseaux aériens qui repartaient ensuite dans les airs.
Agobard dit pourtant bien qu'il n'avait jamais réussi à trouver un seul témoin d'un tempestaire en action.
Quant à l'épisode des quatre prisonniers (qui sont tout de même bien trois hommes et une femme) il ne suit absolument pas le texte d'Agobard, mais bien celui de Montfaucon de Villars, dans son Comte de Gabalis.
On remarque qu'Agobard, qui était brun et moustachu dans la bande dessinée de 1979, est ici roux et barbu. Pour le reste, tout est bien sûr faux, puisque Le Comte de Gabalis n'était qu'une fiction.
Jean Prost veut continuer d'ignorer le texte d'Agobard, qui dit que ce sont les ravisseurs des prisonniers qu'Agobard interrogea, et non les prisonniers eu mêmes. Néanmoins il ose prétendre que cette histoire nous est parvenue grace aux écrits d'Agobard lui même.
Puis il nous sort la légende de Charlemagne face aux vaisseaux aériens, avec en prime une allusion à Ezéchiel, qui n'a jamais parlé de vaisseaux aériens, mais de quatre roues qui ne se tournaient pas en marchant. Il s'agit de la version moderne de la légende où Charlemegne interdit de s'en prendre aux occupants de vaisseaux aériens, alors que dans la version précédente il les condamnait. Ces deux versions sont aussi fausses l'une que l'autre, puisque Charlemagne condamnait seulement ceux qui provoquaient des temmpètes (avec l'aide supposée du diable).
L'auteur nous avait déja sorti, en 1980, une version non dessinée, où il n'y avait quasiment rien de vrai. Dessiner sa propre version de l'histoire n'a rien arrangé.
La bande dessinée dans son ensemble, se veut une compilation d'histoires merveilleuses survenues à Lyon. Elle utilise un procédé littéraire classique, ou le narrateur est un personnage intemporel. Ici, c'est un moine qui se veut une sorte de comte de Saint-Germain lyonnais. D'autres ont employé le juif errant. Mais ce faisant l'auteur, pourtant professeur d'histoire en retraite, s'autorise à chercher systématiquement le merveilleux, et non les faits historiques. Ce n'est plus un livre d'Histoire, mais un livre d'histoires, plus légendaires les unes que les autres. Voila pourquoi l'histoire inventée par Montfaucon de Villars est préférée au récit d'Agobard.
SOURCE: Jean Prost, Mystères en pays lyonnais, Cosmogone, 2019, p 5-9
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