La prophétie de Balaam

La prophétie de Balaam, bien que non mentionnée par l'évangéliste Matthieu, est utilisée par ses commentateurs, pour justifier par l'écriture dite sainte, le verset de Matthieu "nous avons vu son étoile au Levant"
En fait, la prophétie dit seulement: "une étoile sort de Jacob, c'est à dire d'Israel, mais les commentateurs faisant une fixation sur le mot "étoile", ne sont guère préoccupés de vraisemblance. Nous allons voir que la prophétie de Balaam ne concerne nullement un astre.

Milieu du IIIème siècle, Origène fait prédire une comète par Balaam
A l'égard des comètes, je puis bien dire qu'on n'a jamais vu qu'aucun oracle ait marqué qu'il en paraîtrait une certaine en tel temps, ou à l'établissement de tel empire : mais pour celle qui parut à la naissance de Jésus, Balaam l'avait prédite en ces termes, selon que Moïse nous le rapporte : Une étoile se lèvera de Jacob, et un homme sortira d'Israël (Nomb., XXIV, 17).
(Origène, Contra Celsum, I,58)

IVème siècle, Ambroise de Milan fait des mages des descendants de Balaam.
Sed tamen qui sunt isti Magi, nisi qui, ut historia quaedam docet, a Balaam genus docunt, a quo prophetarum est: Orietur stella ex Jacob ?
Cependant qui sont ces mages, sinon, comme une histoire nous l’apprend, des descendants de ce Balaam, qui a prophétisé : Une étoile s’élèvera de Jacob ?
(Ambrosius, expositio evangeli secundum Lucam, lib.II, Migne, PL 15, col 1570)

Fin du IVème siècle, Jean Chrysostome voit dans Balaam un méchant homme
3. Quoi donc ! direz-vous, est-ce que Dieu les ordonne tous, même les indignes? Dieu ne les ordonne pas tous, mais il opère lui-même par le ministère de tous, même des indignes, pour le salut du peuple. S'il s'est autrefois servi d'un âne, et d'un méchant. homme tel que Balaam pour bénir son peuple (Nomb. XXII); pourquoi ne se servirait-il pas d'un prêtre ?
(Homélie 2)
Vous trouverez un exemple du même genre à propos de Balaam. En effet, appelé pour maudire le peuple, non-seulement il ne le maudit pas, mais encore il prédit beaucoup de choses étonnantes, non-seulement concernant le peuple, mais encore sur l'avènement de notre Sauveur. (Nomb. XXIV.)
(Homélie 21)
Car Balaam n’avait ni la foi ni la pureté de la vie, et, néanmoins, il reçut ce don pour l’édification des autres.
(Homélie 24 sur Matthieu)
L'Ecriture, au reste, nous fait entendre aussi très-probablement que certains prédicateurs comme ceux-là-, menaient dès le début une vie criminelle ; dans les commencements du christianisme, la grâce opérait même par d'indignes ministres. Si elle a opéré en effet par Balaam, combien plutôt, dates l'intérêt de ceux qu'ils devaient gagner, Dieu daigna employer d'indignes instruments.

(Commentaire de l'épitre aux Hébreux)

Vers 400, Jérome de Stridon hésite entre les démons et la prophétie de Balaam
intantum ut magi de Oriente docti a daemonibus, vel juxta prophetiam Balaam (Num. XXIV) intelligentes natum Filium Dei, qui omnem artis eorum destrueret potestatem, venerint Bethleem, et ostendente stella, adoraverint puerum (Matth. II).
à tel point que les mages de l'orient, instruit par les démons, ou comprenant d'après la prophétie de Balaam ( Nombres. XXIV ) la naissance du fils de Dieu , qui avait anéanti tout le pouvoir de leurs arts, vinrent à Bethléeem, et l'étoile se montrant, adorèrent l'enfant (Matthieu II)
(Jérome de Stridon, Commentaires sur Isaïe, VII,19)

Vers 1260, Jacques de Voragine nous raconte une belle histoire.
L’ÉPIPHANIE
(6 janvier)
Saint Jean Chrysostome nous donne une autre explication de la venue des mages à Jérusalem. C’étaient, suivant lui, des astrologues qui, de père en fils, passaient trois jours par mois sur une haute montagne, dans l’attente de l’étoile qu’avait prédite Balaam. Or, dans la nuit de la naissance du Christ, une étoile leur apparut qui avait la forme d’un merveilleux enfant, avec une croix de feu sur la tête ; et elle leur dit : « Allez vite dans la terre de Juda, vous y trouverez un enfant nouveau-né qui est le roi que vous attendez ! »

(Jacques de Voragine, la légende dorée (entre 1260 et 1266)
Note: Malgré toute son amitié pour nous, Google n'a pu trouver trace de cette histoire chez Jean Chrysostome.

Fin du XVIIème siècle, Elie Benoist fait une biographie-fiction de Balaam
Je n'entrerai pas ici dans la discussion de ce qui regarde Balaam: Je dirai seulement que je ne le crois ni un Prophète, comme quelque uns, ni un Enchanteur, comme quelques autres. Je le crois un Lettré, un Mage, un fameux Observateur des Astres, renommé entre ceux de son temps par le succès de ses Prédictions, & recherché à cause de cela par ceux qui le regardoient comme un homme extraordinaire. Cela posé, il est aisé de juger que ses principes étaient reçus avec confiance par ses disciples, d'autant plus que l'expérience avoit fait connoitre qu'il avoit été juste dans ses Prédiction. Or entre celles qui sont venues jusqu'à nous, il n'y en a point de plus remarquable que celle qu'on trouve Nombres XXIV. 17. où il est parlé de l'Etoile qui devoit sortir de Jacob et apporté de grands changements au monde. Sur quoi il faut observer , qu'encore que dans cette Prédiction Balaam semble partager ses vues sur différens sujets, néanmoins on reconnoit aisément que tous ces articles séparés doivent être réunis dans une seule Prédiction complette , qui embrasse toute l'Histoire Juive. "
(J.G. de Chaufepié, Nouveau Dictionnaire Historique et Critique, article Benoist (Elie), Amsterdam, 1750)
Note: Elie Benoist, théologien protestant, et émigré aux Pays Bas par la révocation de l'édit de Nantes, est ici en pleine rêverie. Le livre des Nombres dit seulement que le roi de Moab envoie chercher Balaam parce qu'il sait que celui que Balaam maudit est maudit. Elie Benoist fait de Balaam un astrologue infaillible sur l'exemple de la réussite de sa prophétie sur Israel. Il n'a pas réfléchi à ce que le succès de cette prophétie vient de ce qu'elle a été écrite après coup

1715, Dom Calmet se prend les pieds dans la mort de Balaam.


Dom Calmet
Balaam qui étoit du même pays, étoit un devin, ou un prophète fameux du temps de Moyse. Les pères & les commentateurs reconnoissent que les Mages qui vinrent adorer JESUS-CHRIST, étoient des successeurs de cet ancien sage, & que ce fut sur sa prophétie qu'ils vinrent à Jérusalem chercher le nouveau roi, dont ils avoient vu le signe dans leur pays.
 Ils s'en expliquent eux-mêmes d'une manière assez claire: Où est le Roi des Juifs nouvellement né ? car nous avons vû son étoile dans l'Orient. En quel endroit de l'Ecriture la venue du Messie est-elle désignée sous le symbole du lever d'une étoile ? & par quelle autre voie ces étrangers pouvoient-ils connoître que ce nouveau phénomène désignoit la venue du Messie attendu des Juifs, sinon par la prophétie de Balaam, qui s'étoit conservée dans leur nation, & qui étoit passée jusqu'à eux par tradition de pere en fils?

(Dom Augustin Calmet, Nouvelles dissertations importantes et curieuses, Paris, 1715)
Note: Dom Calmet ferait mieux d'appliquer son principe d'économie, et de reconnaître que l'étoile prédite par Balaam est à prendre au sens figuré. Le voila obligé d'embrayer sur la théorie d'Ambroise de Milan, en supposant une tradition de père en fils, alors que le livre des nombres ne dit pas que Balaam eut des fils, mais dit qu'il fut massacré avec les Madianites (et donc ses fils avec lui s'il en avait eu).

1732, le dictionnaire de Moreri est prudent.
Quelques anciens ont crû que la prophétie de Balaam dont la tradition étoit restée dans le pays de s Mages, leur avoit donné lieu de croire que cette étoile désignoit la naissance du roi promis aux juifs; mais c'est une conjecture qui ne paroit pas fort vraisemblable
(Louis Moreri, Le grand Dictionnaire Historique, article MAGES qui vinrent adorer Jésus-Christ, 1732)
Note: Les premières éditions du vivant de Moreri ne contiennent pas ce passage.

1776, Voltaire ne croit pas à la prophétie de Balaam.


Voltaire
Cette étoile de Jacob, jointe avec cette verge, fait voir que Balaam était supposé né dans la Chaldée, où l’on crut, et où l’on croit encore que chaque nation est sous la protection d’une étoile : ainsi l’étoile de Jacob devait l’emporter sur l’étoile de Moab ; et la verge d’Israël devait vaincre les autres verges, comme la verge de Mosé vainquit la verge de Jannès et de Mambrès magiciens du pharaon d’égypte. On n’entend point le sens de ces paroles, elle ruinera tous les enfans de Seth . Ces enfans étaient les juifs eux-mêmes. Tout cela fait soupçonner à plusieurs savants, que l’histoire de Balaam insérée dans le pentateuque n’a été écrite que très tard, et après les conquêtes d’Alexandre.
(Voltaire, La Bible enfin expliquée, chapitre NOMBRES, 1776)
Note: L'idée de Voltaire est que la prophétie de Balaam (qui, canoniquement, n'était même pas prophète) a été faite après coup, et c'est un fait qu'elle réussit trop bien, à coté des prophéties des grands prophètes bibliques, dont les juifs attendent encore la réalisation. Mais il se trompe en disant que l'histoire date d'après les conquètes d'Alexandre. Elle raconte la chute de Babylone qui eut lieu sous Cyrus, ce qui permit ensuite aux Juifs de rentrer à Jérusalem.

1826, l'abbé Clémence prétend réfuter Voltaire.
Passons à la preuve sur laquellé le critique établit que l’histoire de Balaam n'a pu étre écrite qu’aprés les conquétes d'Alexandre. C’est que l‘auteur parle de Kittim , qu’on prétend étre la Gréce et qu’Alexandre avait une flotte contre Darah , que nous appelons Darius. Pour sentir la force de ce raisonnement, il faut se rapprocher du texte du livre des Nombres : Ils viendront du pays de Kittim dans des vaisseaux; ils vaincront les Assyriens, ruineront les Hébreux, et à la fin, ils périront eux-mêmes. Voici, a dit l’incrédule , les conquétes des Grecs en Asie prédites, elles ne peuvent l’avoir été qu'apres l‘événement, donc le livre qui contient cette prédiction est, postérieur aux conquétes d’Alexandre. Mais pourquoi rester en si beau chemin? Pourquoi n’a-t-il pas conclu que ce livre n’avait pu étre écrit que sous le régne d'Auguste, aprés la destruction de l'empire des Séleucides et des Ptolomées ? Car le phophéte ne prédit pas seulement les victoires des hommes de Cethim sur les Assyriens et sur les descendans d’Héber; i1 prédit encore la ruine totale de l'empire que formérent ces conquérans, en ajoutant et à la fin ils périront eux-mémes : or, l’empire des Grecs, successeurs d‘Alexandre, a subsisté jusqu’au régne d’Auguste ; (donc le livre des Nombres et la prophétie qu’il contient n’ont été écrits que du temps d‘Auguste. Telles sont les conséquences absurdes, mais inévitables , de ce beau principe des incredules, qu’il ne faut reconnaitre dans les auteurs de l’ancien Testament, ni esprit prophétique, ni inspiration divine.
(Clémence, p 218)
Note: L'édition originale date de 1782, et l'abbé Clémence est mort en 1792
Dans son ouvrage, l'auteur aligne les erreurs de raisonnement, sans en rien voir, car pour lui:
axiome: la bible est vraie.
théorème: tout argument prouvant le contraire est faux.
Ici, comme souvent, l'auteur ne distingue pas condition nécessaire et suffisante. Il extrapole la remarque de Voltaire pour arriver à une conclusion absurde, et s'imagine ainsi avoir prouvé la réalité de la prophétie. Mais si Voltaire va peut être trop loin en situant l'ajout de la prophétie après les conquètes d'Alexandre, on s'accorde à penser que le livre des Nombres est composite. La prophétie de Balaam, par ailleurs autoréfutable, et trop précise parait bien avoir été rajouté après coup, mais l'aurait été au moment du retour des juifs à Jérusalem, après la conquète de Babylone par Cyrus.

1912, H. LESETRE. réfute l'interprétation littérale de la prophétie de Balaam.
D‘aprés quelques Péres de l'Eglise, la prophétie de Balaam: « Une étoile se lévera de Jacob, » Num., XXIV, 17, aurait été connue en Orient et interprétée dans un sens littéral; les mages auraient vu dans l’étoile de l’Epiphanie cette étoile prophétique. Origéne, Contra Cels., I, 60, t. XI, col. 769-771 (et la note 78); Pseudo-Basile, Homilia in sanctam Christi generat., 5, t. XXXI, col. 1464; S. Ambroise, In Luc., II, 48, t. xv, col. 1570.
Cette interprétation littérale ne peut pas étre admise. L'étoile des mages ne sort pas de Jacob, mais elle apparait en Orient et conduit à Jacob, au Messie, son descendant.
H. LESETRE.

(Fulcran Vigouroux, Dictionnaire de la Bible, Letouzey, 1912)
Note: Cet argument parait évident, et pourtant il a fallu attendre le XXème siècle pour le voir apparaître.

La signification réelle de la prophétie de Balaam

Quelque soit la traduction qu'on utilise, la prétendue prophétie de Balaam ne s'accorde guère avec une apparition astronomique. Voici le texte hébreu.

La traduction Lamaistre de Saci d'après la vulgate (1759):
Une étoile sortira de Jacob, un rejeton s'élèvera d'Israël;
La traduction du rabbinat (1902):
un astre s'élance de Jacob, et une comète surgit du sein d'Israël,
La traduction protestante de Louis Second (1910):
Un astre sort de Jacob, Un sceptre s'élève d'Israël.
La traduction du chanoine Osty (1970):
Une étoile sort de Jacob, un sceptre surgit d'Israel
La traduction catholique de Jérusalem (1973):
Un astre issu de Jacob devient chef, un sceptre se lève, issu d'Israël
La traduction Bayard (2001):
Une étoile marche depuis Jacob, un sceptre s'élève d'Israel.
La traduction Oecuménique de la Bible (TOB, 2010):
De Jacob monte une étoile, d’Israël surgit un sceptre

Mais en comprenant bien que tout cela est au sens figuré, toutes ces traductions peuvent se résumer en quelques mots:
Un roi brillant s'élèvera d'Israel
Cela se confirme d'ailleurs, si on examine quelques versets de plus (TOB):
17 ...
De Jacob monte une étoile, d’Israël surgit un sceptre
qui brise les tempes de Moab et décime tous les fils de Seth.
18 Edom sera pays conquis ; pour ses ennemis Séïr sera pays conquis
– Israël déploie sa force.
19 De Jacob surgit un dominateur ; il fait périr ce qui reste de la ville. »

L'étoile issue de Jacob est donc bien un chef dominateur, et non une étoile du ciel. Le serait elle que cela ne s'accorderait toujours pas avec le texte de Matthieu :"nous avons vu son étoile au Levant (à son lever)", puisque l'étoile ne se levait pas dans la direction d'Israel, ni avec ses enrichissements, ou l'étoile se dirige vers Israel, au lieu d'en sortir.

Le syndrome d'autoréfutabilité.

L'autoréfutabilité c'est la propriété d'un récit, de se réfuter lui même en contenant des éléments qui impliquent que ce qui est décrit n'a pas pu se produire.

Carl Sagan avait ainsi démontré l'impossibilité du père Noêl, qui, selon la légende, distribue des cadeaux dans cent millions de maisons, la nuit de Noël. C'est simple: le temps de visite d'une maison est forcément supérieur au temps minimum de descente dans la cheminée, qui est celui de la chute libre dans la cheminée d'une maison sans étage (5 m, donc 1 s). Donc, en supposant que le père Noêl distribue ses cadeaux sans jamais s'arrêter, il lui faut plus de cent millions de secondes, soit plus de trois ans, et non une nuit pour faire cette distribution.

Il y a des exemples simples d'autoréfutabilité. La phrase: "je suis en train de vous mentir", ne peut être prononcée ni par un homme sincère, ni par un menteur, puisque tous les deux diraient "je dis vrai".
De même, personne ne pourrait dire: "je suis mort l'an dernier". Et pourtant, nombre de gens gobent des histoires que le narrateur ne pouvait connaître, parce qu'il n'aurait jamais pu se la faire raconter, en particulier quand celui qui aurait pu la raconter est mort avant d'avoir pu en parler:

1818, Collin de Plancy s'interroge.
- Un Chevalier espagnol aimait une religieuse et en était aimé. Une nuit qu’il allait la voir , en traversant l'église du convent , dont il avait la clef, i1 vit quantité de cierges allumés , et plusieurs prétres qui lui étaient tous inconnus , occupés à célébrer l’office des morts, autour d’un tombeau fort élevé. Il s’approcha de l'un d’eux , et lui demanda pour qui on faisait le service. - Pour vous , lui dit le prétre. Tous les autres lui firent la méme réponse. C‘est pourquoi il sortit tout effrayé, remonta à cheval, s’en retourna à la maison, et deux chiens l'étranglérent à sa porte ( 1). A qui a-t-il pu raconter son aventure s’il mourut avant de rentrer chez lui ?...
(1) Torquemada

(Collin de Plancy, dictionnaire infernal, 1ère édition, 1818, article FANTOMES)
Note: Effectivement, cette histoire du chevalier espagnol est l'archétype de l'histoire autoréfutable: personne ne pouvant avoir su ce qui s'était passé, cette histoire n'est qu'une fable.

En général, il suffit de se poser la question: Comment le narrateur l'a-t-il su? pour distinguer l'histoire vécue, même déformée du simple conte.
Dans un conte, ou toute oeuvre de fiction, l'auteur se contente de faire un récit cohérent, même s'il nécessite des éléments prérequis, comme la croyance au fées ou aux extraterrestres. L'auteur est maître du temps, du lieu, du cadre, du scénario, et personne ne viendra lui demander: comment l'avez vous su?
Il en va tout autrement dans un récit, ou même sans prétention historique, les faits sont censés s'être réellement passés. Si le récit contient des éléments autoréfutables, nous pouvons le considérer comme une fable.

L'absurdité de l'histoire de Balaam

Le récit de l'histoire de Balaam est un magnifique exemple d'histoire autoréfutable, bourré d'absurdités, d'impossibilités, et de blasphème (car il fait passer Dieu pour un con tyrannique)
Nous le commentons ici d'après la traduction oecuménique de la Bible (TOB)

(Les Israelites viennent d'entrer dans la plaine de Moab, et le roi de Moab s'en inquiète)
22,4 Balaq, fils de Cippor, était roi de Moab en ce temps-là.
22,5 Il envoya des messagers auprès de Balaam, fils de Béor, à Petor sur le Fleuve, son pays d’origine, pour lui porter cet appel : « Nous avons là un peuple sorti d’Egypte qui couvre la surface de la terre : le voilà établi en face de moi !
22,6 Viens donc, je t’en prie, et maudis-moi ce peuple, car il est plus puissant que moi ; peut-être arriverai-je alors à le battre et à le chasser du pays. Car je le sais, celui que tu bénis est béni, et celui que tu maudis est maudit. »
Note: Balaq croit à la puissance de la malédiction, mais comment comment connait il la puissance de Balaam, dont c'est la première mention dans la Bible?
Autre bizarrerie signalée, au moins depuis Voltaire: Petor est à environ 600 km du royaume de Moab. Et pourtant Balaam arrive auprès du roi, après deux aller-retours de ses émissaires.

22,7 Les anciens de Moab et les anciens de Madiân s’en allèrent donc en emportant de quoi rétribuer le devin. Arrivés chez Balaam, ils lui rapportèrent les paroles de Balaq.
22, 8 Balaam leur dit : « Passez ici la nuit ; je vous rendrai réponse suivant ce que me dira le SEIGNEUR. » Les dignitaires de Moab demeurèrent donc chez Balaam.
22,9 Dieu vint auprès de Balaam et lui dit : « Qui sont ces hommes qui se trouvent chez toi ? »
Note: Donc le Dieu de Balaam est le même que celui d'Israel, ce qui est bizarre, car Balaam ignore encore tout d'Israel.
Ensuite, Dieu omnipotent, vient auprès de Balaam, comme serait venu le chef du village.
Enfin, Dieu omniscient sait que des émissaires sont venus chez Balaam, mais ignore d'où ils viennent.

22,10 Balaam dit à Dieu : « Balaq, fils de Cippor, le roi de Moab, m’a envoyé dire :
22,11 Voilà que le peuple sorti d’Egypte couvre la surface de la terre. Viens donc et maudis-le pour moi ; peut-être arriverai-je alors à le combattre et à le chasser. »
22,12 Dieu dit à Balaam : « Tu n’iras pas avec eux et tu ne maudiras pas ce peuple, car il est béni. »
Note: Dieu informe Balaam, qui ignore encore ce qu'est le peuple d'Israel.
22,13 Le lendemain matin, Balaam se leva et dit aux dignitaires de Balaq : « Repartez pour votre pays, car le SEIGNEUR refuse de me laisser partir avec vous. »
22,14 Les dignitaires de Moab se levèrent et revinrent auprès de Balaq ; ils lui dirent : « Balaam n’a pas voulu venir avec nous. »
22,15 Mais Balaq envoya encore d’autres dignitaires, cette fois plus nombreux et plus importants que les premiers.
22,16 Arrivés auprès de Balaam, ils lui dirent : « Ainsi parle Balaq, fils de Cippor : De grâce, ne refuse pas de venir chez moi !
22,17 Car je te comblerai d’honneurs et je ferai tout ce que tu me diras. Viens donc et maudis-moi ce peuple. »
22,18 Balaam répondit aux serviteurs de Balaq : « Quand Balaq me donnerait tout l’argent et tout l’or que peut contenir sa maison, je ne pourrais pas faire une chose, petite ou grande, qui soit contraire à l’ordre du SEIGNEUR, mon Dieu.
Note: Balaam, parait ici bien plus fidèle à Dieu que le peuple d'Israel lui même.
22,19 Demeurez donc ici, vous aussi, cette nuit, en attendant que je sache ce que le SEIGNEUR a encore à me dire. »
22,20 Dieu vint auprès de Balaam pendant la nuit et lui dit : « Si c’est pour t’appeler que ces hommes sont venus, vas-y, pars avec eux. Mais tu feras seulement ce que je te dirai. »
Note: A nouveau, Dieu se déplace en personne, mais ce "pendant la nuit" laisse entendre qu'il pourrait s'agir d'un songe.
22,21 Le lendemain matin, Balaam se leva, sella son ânesse et partit avec les dignitaires de Moab.
22,22 Mais Dieu se mit en colère en le voyant partir, et l’ange du SEIGNEUR se posta sur le chemin pour lui barrer la route tandis qu’il cheminait, monté sur son ânesse, accompagné de ses deux serviteurs.
Note: Encore un blasphème. Non seulement Dieu n'est plus omniscient, mais il ne se rappelle même plus de ce qu'il avait ordonné la veille.
22,23 L’ânesse vit l’ange du SEIGNEUR posté sur le chemin, l’épée nue à la main ; quittant le chemin, elle prit par les champs. Balaam battit l’ânesse pour la ramener sur le chemin.
22,24 L’ange du SEIGNEUR se plaça alors dans un chemin creux qui passait dans les vignes entre deux murettes.
22,25 L’ânesse vit l’ange du SEIGNEUR : elle se serra contre le mur. Comme elle serrait le pied de Balaam contre le mur, il se remit à la battre.
22,26 L’ange du SEIGNEUR les dépassa encore une fois pour se placer dans un passage étroit où il n’y avait pas la place d’obliquer ni à droite, ni à gauche.
22,27 L’ânesse vit l’ange du SEIGNEUR ; elle s’affaissa sous Balaam qui se mit en colère et la battit à coups de bâton.
22,28 Le SEIGNEUR fit parler l’ânesse et elle dit à Balaam : « Que t’ai-je fait pour que tu me battes par trois fois ? » –
22,29 « C’est, lui dit Balaam, que tu en prends à ton aise avec moi ! Si j’avais une épée en main, je te tuerais sur-le-champ ! »
22,30 L’ânesse dit à Balaam : « Ne suis-je pas ton ânesse, celle que tu montes depuis toujours ? Est-ce mon habitude d’agir ainsi avec toi ? » – « Non », dit-il.
Note: Dieu s'amuse à mystifier Balaam, en lui cachant l'ange que peut voir l'anesse. Puis il fait parler l'anesse, comme dans un conte pour enfant de trois ans. Le rédacteur semble bien se moquer à la fois de Dieu et de son lecteur. Mais le plus fort, c'est que la plupart des commentateurs n'y voient que du feu, et tentent de justifier, ce qu'il nous fait bien appeler une ânerie.
22,31 Le SEIGNEUR dessilla les yeux de Balaam, qui vit l’ange du SEIGNEUR posté sur le chemin, l’épée nue à la main ; il s’inclina et se prosterna face contre terre.
22,32 Alors l’ange du SEIGNEUR lui dit : « Pourquoi as-tu battu ton ânesse par trois fois ? Tu le vois, c’est moi qui suis venu te barrer la route car, pour moi, c’est un voyage entrepris à la légère.
22,33 L’ânesse m’a vu, elle, et par trois fois s’est écartée de moi. Si elle ne s’était pas écartée devant moi, je t’aurais tué sur-le-champ, tandis qu’à elle j’aurais laissé la vie sauve. »
Note: Et voila! sans l'anesse l'ange aurait tué Balaam, coupable d'avoir obéi à Dieu. blasphème: Dieu apparait ici comme un sombre tyran.
22,34 Balaam dit à l’ange du SEIGNEUR : « J’ai péché, car je n’ai pas reconnu que c’était toi qui étais posté là, devant moi, sur le chemin. Maintenant si ce voyage te déplaît, je m’en retournerai. »
22,35 Mais l’ange du SEIGNEUR lui dit : « Va avec ces hommes, mais tu diras seulement la parole que je te dirai. » Balaam s’en alla donc avec les dignitaires de Balaq.
Note: C'était bien la peine de faire tout ce cinéma pour redire à Balaam ce que Dieu venait de lui dire la veille. D'autre part l'ange parle comme s'il était Dieu lui même. Mais sachant que Dieu vient voir Balaam, comme on viendrait voir un parent, c'est déjà moins étonnant
22,36 Apprenant que Balaam venait, Balaq vint à sa rencontre à Ir-Moab, sur la frontière marquée par l’Arnôn, à la limite de son territoire.
22,37 Balaq lui dit : « N’ai-je pas envoyé assez de monde pour t’appeler ? Pourquoi n’es-tu pas venu ? Ne suis-je donc pas en mesure de te traiter avec honneur ? »
22, 38 Balaam répondit à Balaq : « Eh bien, je suis venu jusqu’à toi ; maintenant, me sera-t-il possible de dire quoi que ce soit ? Je dirai la parole que Dieu mettra dans ma bouche. »
(ici, la première prophétie de Balaamn que nous ne citons pas)
23,11 Balaq dit à Balaam : « Que m’as-tu fait ? Je t’ai amené pour maudire mes ennemis et voilà que tu les couvres de bénédictions ! »
23,12 Balaam répondit : « Ne dois-je pas, quand je parle, m’en tenir à ce que le SEIGNEUR met dans ma bouche ? »
(ici, la deuxième prophétie de Balaam)
23,25 Balaq dit à Balaam : « Si tu ne le maudis pas, du moins ne le bénis pas. »
23,26 Et Balaam lui répondit : « Ne t’avais-je pas dit : “Je ferai tout ce que dira le SEIGNEUR” ? »
(ici, la troisième prophétie de Balaam)
10 Balaq se mit en colère contre Balaam ; il frappa des mains et lui dit : « Je t’ai appelé pour maudire mes ennemis et voici la troisième fois que tu les couvres de bénédictions !
11 Puisqu’il en est ainsi, va-t’en dans ton pays ! J’avais dit que je te comblerais d’honneurs ; mais voilà, le SEIGNEUR te prive de ces honneurs. »
12 Balaam lui répondit : « N’avais-je pas expressément dit aux messagers que tu m’as envoyés :
13 “Quand Balaq me donnerait tout l’argent et tout l’or que peut contenir sa maison, je ne pourrais transgresser l’ordre du SEIGNEUR en amenant bonheur ou malheur de ma propre initiative. Je dirai ce que dira le SEIGNEUR” ?
Note: Cette obstination à parler au nom du Seigneur montre que Balaam est bel et bien un prophète, et non un devin étranger, voire un méchant homme comme l'écrit Jean Chrysostome.
24,14 Eh bien ! maintenant, je m’en vais chez les miens ; mais viens, je veux t’aviser de ce que fera ce peuple au tien dans la suite des temps. »
24,15 Alors il prononça son incantation en ces termes : « Oracle de Balaam, fils de Béor, oracle de l’homme à l’œil ouvert,
24,16 oracle de celui qui entend les paroles de Dieu, qui possède la science du Très-Haut, qui voit ce que lui montre Shaddaï quand il tombe en extase et que ses yeux s’ouvrent.
24,17 Je le vois, mais ce n’est pas pour maintenant ; je l’observe, mais non de près : De Jacob monte une étoile, d’Israël surgit un sceptre qui brise les tempes de Moab et décime tous les fils de Seth.
24,18 Edom sera pays conquis ; pour ses ennemis Séïr sera pays conquis – Israël déploie sa force.
24,19 De Jacob surgit un dominateur ; il fait périr ce qui reste de la ville. »
24,20 Balaam vit encore Amaleq et prononça son incantation en ces termes : « Amaleq, première des nations ! Mais son avenir, c’est la ruine. »
24,21 Puis il vit les Qénites et prononça son incantation en ces termes : « Ta demeure est solide et ton nid posé sur la roche.
24,22 Pourtant Caïn sera la proie des flammes, et finalement Ashour te fera prisonnier. »
24,23 Enfin, il prononça son incantation en ces termes : « Malheur ! qui survivra à l’action de Dieu ?
24,24 De Kittim, voici des navires… Ils opprimeront Ashour, opprimeront Eber ; lui aussi court à sa perte. »
Note: A l'inverse des prédictions des prophétes hébreux, qui sont floues ou ne se réalisent pas, cette prophétie contre les ennemis d'Israel, s'est réalisé, ce qui laisse entendre, comme l'avait compris Voltaire qu'elle a été écrite après coup, comme les oracles de la Sybille. L'histoire de Balaam pourrait donc bien avoir été écrite au moment du retour des Juifs à Jérusalem, après que Cyrus se soit emparés de Babylone.
24,25 Balaam s’en alla et retourna dans son pays ; et Balaq s’en alla de son côté.

Note: Ici, nous voyons encore le syndrome d'autoréfutabilité à l'oeuvre. En effet le livre des nombres a été écrit par un rédacteur Hébreu, et non par Balaam, ou par un rédacteur Moabite. Or les hébreux n'ont évidemment rien su de ce qui s'était passé entre Balaam et le roi de Moab, et ce n'est certainement pas le roi qui l'aurait raconté aux hébreux. Quant à l'histoire de l'anesse, qui aurait pu la raconter? pas Balaam, qui rentra chez lui, en Mésopotamie, encore moins son anesse!
Force est de constater que toute cette histoire de Balaam a la structure d'un conte. Et nous venons de voir de quelle époque date ce conte.


Le livre des nombres va encore nous parler de Balaam.
31,8 En plus de ces victimes, ils tuèrent aussi les rois de Madiân : Ewi, Rèqem, Çour, Hour et Rèva, les cinq rois de Madiân. Ils tuèrent encore par l’épée Balaam, fils de Béor.
Note: Et voila, les Israélites tue Balaam, coupable de les avoir glorifié en obéissant à Dieu. Est ce un nouveau blasphème, ou simplement un mensonge? Balaam, rentré à Pétor, sur l'Euphrate ne risquait pas d'être exterminé avec les madianites.

L'absurdité criminelle du livre des nombres

Nous venons de voir que la prophétie de Balaam, ne peut qu'avoir été inventée, probablement au moment du retour des juifs à Jérusalem. Nous avons vu aussi que Balaam fut puni pour avoir obéi, à Dieu. Ce n'est pas hélas, la seule fois ou Dieu punit ceux qui lui obéissent. Il punit aussi Moïse et Aaron, pour lui avoir obéi (20,12). Pire, le livre des nombres fait l'apologie du crime, du racisme et du génocide. Dieu y récompense Pinhas, fils d'Eleazar, pour avoir assasiné Zimir, fils de Salou, coupable de coucher avec Kozbi, fille de Sour, une Madianite. (25, 6-11)
On remarque au cours du livre que les colères de Yahvé sont comme celles d'un tyran, il s'enflamme sans raison explicite, et commence à bruler le camp des israelites, parce qu'ils avaient murmuré.
On remarque aussi par quels artifices Moïse maintient son peuple sous sa domination. Ayant choisi soixante dix anciens pour s'imprégner de l'esprit de Yahvé atour de la tente de la rencontre, ils se mettent à prophétiser (entendez: à délirer). Or deux anciens, Eldad et Médad, étaient restés au camp, et prophétisèrent tout de même (11,24-29). La conclusion est immédiate: Moïse les avait drogué.
La fin du livre des nombres ressemble à un itinéraire de la mort, prélude au grand génocide du livre de Josué, et d'ailleurs lachement justifié par ses commentateurs. Ne fallait il pas justifier les crimes du peuple de Dieu?
Les Israélites massacrent les Amorrhéens et occupent leur villes, puis ils massacrent les habitants de Bachân. Ils empalent ensuite ceux des chefs d'Israel qui avaient fréquenté des femmes Madianites. Puis ils massacrent tous les hommes Madianites, puis toutes les femmes. Quel saint peuple! Bien sûr, à en croire la "sainte" écriture, ces génocides ont été commis sur l'ordre de Dieu. On peut en déduire qu'en fait d'écriture sainte, le libre des nombres blasphème, en faisant de Dieu un sordide criminel. Le livre de Josué ira d'ailleurs encore plus loin dans le blasphème.
Maintenant quel crédit peut accorder à un prétendu livre saint, qui, en réalité blasphème? Il semblerait logique qu'on ne lui en accorde aucun. Et pourtant la prophétie de Balaam, pourtant autoréfutable et inadéquate, a été utilisé pour justifier la légende des mages, exactement, comme un passage apocryphe et incohérent du livre de Josué, encore plus blasphénatoire, fut utilisée contre Galilée.

Dernière mise à jour: 13/02/2015

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